Jean LORRAIN
Né Martin Paul Alexandre DUVAL dit…
Le 9 août 1855 à 19h à Fécamp 76 Seine-Maritime
Selon acte n°234 – AD76 en ligne - 4 E 08344 – 1855 Fécamp – vue 98/175
Décédé le 30 juin 1906 à Paris
Auteur de poème dès l’âge de 14 ans…
Il devient journaliste, romancier, et auteur de pièces de théâtre
Provocateur-né, Lorrain va des salons chics à la fange des bas-quartiers
Sa plume acide est autant redoutée que recherchée…
S’afficher et provoquer : un besoin pour cet écrivain révélateur de son époque |
Auteur de poème dès l’âge de 14 ans…
Né d’un père armateur, il compose ses premiers vers dès l’âge de 14 ans, alors qu’il est interne chez les Dominicains.
Engagé volontaire à 20 ans dans le 12e Régiment de hussards, il se lance l’année suivante dans des études de Droit qu’il délaisse deux ans plus tard.
C’est alors qu’il se met à fréquenter les salles de rédaction et les cafés où il rencontre auteurs et artistes de la mouvance bohème autour de Rodolphe Salis et son cabaret Le Chat noir.
En 1880, il s’installe pour de bon à Paris trouvant logement dans des meublés à Montmartre. C’est à cette époque que se manifestent ses premières crises de spasmophilie cardiaque.
Son premier recueil de poèmes, Le Sang des dieux, sort en 1882 tandis qu’il collabore à des revues comme Le Chat noir ou Le Décadent dont le propos se veut anti-bourgeois.
L’année suivante sort La Forêt bleue, nouvel ouvrage de poésies.
Jean Lorrain est qualifié d’écrivain parnassien par référence à ce mouvement poétique apparu au milieu du 19e siècle qui valorise l’art pour l’art sans référence à l’utilité ou à la vertu, afin de réhabiliter le travail acharné et minutieux de l’artiste.
Le Parnasse, fresque réalisée par Raphaël de 1509 à 1511. Elle est une représentation de l’habitation du Dieu Apollon, des Muses, aussi la « maison de la poésie » et le « séjour des poètes » (source Wikipedia)
Il devient journaliste, romancier, et auteur de pièces de théâtre
A partir de 1884, pour Le Courrier français, organe satirique très en vogue, il publie une série de portraits dont celui de Rachilde, femme de lettres et salonnière. Les deux auteurs entretiendront une amitié durable.
Jean Lorrain, qui continue à produire des poèmes, sort son premier roman Les Lépillier qui scandalise sa ville natale de Fécamp.
Edmond de Goncourt (fondateur de l’Académie éponyme) jusqu’à son décès en 1896, sera son principal protecteur et ami.
Provocateur-né, Lorrain va des salons chics à la fange des bas-quartiers
Adepte des salons du Tout-Paris aussi bien que de la fange des mauvais quartiers où il apprécie les lutteurs de foire, Lorrain suscite le scandale. Ainsi, pour le bal des Quat’z’Arts, il se présente en maillot rose avec le caleçon en peau de panthère.
Sous le surnom d’Enfilanthrope, il affiche avec tapage son homosexualité.
Caricaturé par Sem
Esthète et dandy, il se veut aussi explorateur du vice et de la vulgarité, ce qui lui vaut le mépris des pudibonds. La nuit parisienne est pour lui laboratoire des expériences défiant l’ordre moral de la bourgeoisie dominante.
Corseté, fardé, drogué, déguisé, travesti, il met sa vie en scène comme une œuvre d’art et une permanente provocation.
La plume pamphlétaire de Léon Daudet le décrit ainsi :
… avait une tête poupine et large à la fois de coiffeur vicieux, les cheveux partagés par une raie parfumée au patchouli, des yeux globuleux, ébahis et avides, de grosses lèvres qui jutaient, giclaient et coulaient pendant son discours. Son torse était bombé comme le bréchet de certains oiseaux charognards. Lui se nourrissait avidement de toutes les calomnies et immondices…
Sa plume acide est autant redoutée que recherchée…
Le journalisme est son moyen de subsistance et ses critiques au vitriol sont aussi redoutées que recherchées, si bien que ses chroniques déploient un véritable bottin des vices parisiens.
Craint par tous, il se veut souverainement libre, vouant un culte à certains mais haï par ceux qu’il prend pour cibles. Ainsi, pour avoir fait une critique violente du recueil de poèmes Les Plaisirs et les Jours, Jean Lorrain est provoqué en duel par l’auteur Marcel Proust. Lors du combat, qui se déroule le 6 février 1897 à Meudon, l’écrivain a parmi ses témoins le peintre Jean Béraud. De même, pour payer sa très lourde amende à la suite du procès perdu contre la peintre Jeanne Jacquemin, Lorrain publie La Maison Philibert qui met en scène deux tenanciers de bordel.
Cette coûteuse histoire fait dire à Jean Lorrain : Sans cette Jacquemin, je serai heureux…
Volontiers misanthrope et anarchiste, il excelle à dépeindre la débauche du monde avec un esprit caustique ironique et vénéneux.
La tragédienne Sarah Bernhardt ne retiendra pas les quelques pièces de théâtre qu’il lui écrit.
Après sa rencontre avec Liane de Pougy, il l’aide à se hisser au premier rang de la galanterie.
Il compose quelques chansons pour Yvette Guilbert qui le tient, cependant, à distance.
En 1903, il est mis en cause dans l’affaire Adelswärd-Fersen, puis dans l’affaire Greuling pour avoir fréquenté les inculpés ; ses écrits sont incriminés pour dégradation de la moralité et incitation au crime.
Les cures qu’il fait, lui donnent l’occasion de peindre avec vigueur les ridicules du tourisme thermal alors très en vogue.
Il passe les dernières années de sa vie avec sa mère sur la Côte d’Azur.
Comme sa santé se dégrade par l’abus des drogues (notamment l’éther) et de la syphilis, il est soigné dans la clinique du Docteur Pozzi où il meurt d’une péritonite le 30 juin 1906.
Caricaturé par Sem
S’afficher et provoquer : un besoin pour cet écrivain révélateur de son époque
Journaliste à la plume affûtée et clairvoyante, il aime s’affirmer à contre-courant et de façon obstinée, puisant ses observations dans le terrain des réalités mondaines ou fangeuses.
Attirer l’attention sur lui est un besoin constant pour cet artiste « no limit » qui conjugue l’esthétisme du dandy avec une jouissance provocatrice des plus bas instincts.
Original, démonstratif et guidé par une fine intuition, il aime se mettre en scène de façon tapageuse et restituer avec éclat toute la diversité de la nature humaine surtout si cela choque et dérange l’ordre établi. C’est sa façon d’exister et de se rassurer.
Le journalisme – outre qu’il est son gagne-pain – lui permet de donner libre-cours à sa sensibilité impitoyable envers qui ne lui plaît pas. Quant au roman, c’est le moyen idéal de délayer avec ampleur son imaginaire prolifique nourri de ses observations environnantes.
Lorrain est un écrivain révélateur impitoyable de son époque.
(Logiciel AUREAS AstroPC Paris)
Retrouvez l'acte sur les Archives Départementales Françaises en ligne |