Jacques d’Adelswärd-Fersen
Alias baron de Fersen ou comte de Fersen
Né le 20 février 1880 à 13h30 à Paris 8e
Selon acte de naissance n°259 – Archives de Paris en ligne – V4E 3445 – vue 5/31
Décédé le 6 novembre 1923 à Capri (Italie)
Apparenté à l’amant de la reine Marie-Antoinette, il en prend le nom
Richement doté par héritage, il fait figure de gendre idéal
Son homosexualité fait scandale et l’amène en prison
Libéré, il s’installe à Capri… et s’embarque pour Ceylan
Avec Nino son jeune amant, il s’embarque pour la Sicile…
Il ambitionne une revue homosexuelle internationale, puis part en Extrême-Orient
L’écriture, les voyages, la drogue, nourrissent sa quête de paradis terrestre |
Apparenté à l’amant de la reine Marie-Antoinette, il en prend le nom
C’est en hommage à son lointain parent le bel Axel de Fersen, séducteur de la reine Marie-Antoinette venue se divertir incognito à un bal masqué parisien, que Jacques d’Adelswärd décide d’ajouter le nom de Fersen à son patronyme. Et dans la foulée il se fait appeler comte ou baron de Fersen.
Orphelin de père à 7 ans, il est élève au Lycée Janson-de-Sailly où il décroche son baccalauréat avant de poursuivre ses études à Genève où il publie son premier recueil de poésie en 1898.
Richement doté par héritage, il fait figure de gendre idéal
A dix-huit ans, héritier d’une grosse fortune suite au décès de son grand-père, il devient un parti très convoité de la jet-set de l’époque. Invité dans tous les salons, beaucoup de familles en vue rêvent de le voir épouser une de leurs filles.
Après dix mois de service militaire, il retourne aux études, hésitant entre la diplomatie et la politique, rejoignant brièvement le parti royaliste avant de choisir l’écriture.
Pour conquérir sa notoriété de poète, il correspond avec les hommes de lettres tels Jean Lorrain et Robert de Montesquiou qui ne le prennent pas au sérieux.
Son homosexualité fait scandale et l’amène en prison
Dès avant son adolescence, Jacques prend conscience de son attirance pour les garçons, et se confie sur ce sujet de façon assez explicite dans sa poésie ainsi que dans sa correspondance avec l’écrivain belge homosexuel et anarchiste Georges Eekhoud.
Il a 23 ans quand durant l’été 1903, sa pédérastie est connue du grand public à la suite d’un scandale qui brise son projet de mariage avec Blanche de Maupeou avec qui il est fiancé depuis quelques mois. De fait, il est mis à l’écart de la société française.
Conduit à la prison de la Santé le 9 juillet 1903, Jacques d’Aldelswärd-Fersen est soumis à un interrogatoire pour une affaire de mœurs homosexuelles.
Ce sujet à sensation emballe la presse qui déforme à loisir des faits bien réels, à savoir des enfants sont emmenés dans une garçonnière louée par le comte de Fersen avenue de Friedland près de l’appartement familial où il vit avec sa mère.
Jacques organisait les jeudis et dimanches des après-midis au cours desquels lui et quelques amis arrangeaient des « tableaux vivants » ou « poses plastiques » qui mettaient en scène, entre autres, des élèves plus ou moins dénudés du Lycée Carnot. La plupart de ces garçons avaient moins de 21 ans et pour certains étaient issus de la bonne société parisienne.
La police, mise au courant dès avril 1903, recueillent des témoignages contradictoires de lycéens dont certains s’adonnent à la prostitution et qui auraient pratiqué le chantage auprès de Jacques qui reconnaît avoir racolé des lycéens à la sortie de l’école…
Ce crime qui n’a pas encore de nom à l’époque, lui vaut une garde à vue sous l’inculpation d’attentat à la pudeur et d’excitation de mineurs à la débauche.
Sa carte de visite vers 1900
Libéré, il s’installe à Capri… et s’embarque pour Ceylan
L’effervescence journalistique retombe durant trois mois, période d’emprisonnement de Jacques. Quand s’ouvre son procès le 28 novembre, la presse va être encore influente en minorant, cette fois, les faits car au même moment la réouverture du procès Dreyfus s’impose à l’actualité.
Jacques, condamné le 3 décembre 1903 à six mois de prison qu’il a déjà faits en préventive, est relâché le soir même.
Son projet de mariage anéanti, suspendu de ses droits civiques, civils et de famille, le jeune homme songe à se suicider puis se ravise et postule à la Légion étrangère sans succès, à cause de sa santé.
Le comte de Fersen part vivre à l’île de Capri qui l’attire, semble-t-il, par la présence active d’une communauté d’artistes cosmopolites.
Embarqué avec quelques amis pour un long voyage vers Ceylan, il rédige en partie son roman Lord Lyllian, pendant le trajet en bateau. Une fois débarqué, il découvre l’opium et l’hindouisme avant de revenir dans sa propriété de Capri à l’été 1904, entouré d’une petite colonie d’excentriques américains et d’artistes italiens.
Nino Cesarini, amant d'Adelswärd-Fersen, peint par Paul Hoecker (1904)
Avec Nino son jeune amant, il s’embarque pour la Sicile…
En séjour à Rome, il rencontre un jeune vendeur de journaux âgé de 15 ans, Nino Cesarini, dont il tombe amoureux. En accord avec la famille de l’adolescent, le comte de Fersen emmène Nino pour un long voyage en Sicile et à l’été 1905, se lance dans la rédaction du livre Une Jeunesse, publié en 1907.
De temps à autre, il revient à Paris pour retrouver des amis et pour ses affaires éditoriales. En effet, il est au final, l’auteur de plus d’une trentaine de romans et d’ouvrages de poésies.
Sa correspondance avec ses amis, désormais connue par sa biographie publiée en Suède en 2014, sous le titre Trop noble, trop riche, trop paresseux : Jacques d’Aldelswärd Fersen par Viveka d’Aldelswärd, éclaire sous un jour nouveau la vie homosexuelle en France avant 1914.
Alors qu’il séjourne à Paris en 1908, il lance Akademos, une revue mensuelle d’Art Libre et de Critique qui sort pendant un an, traitant d’homosexualité côté art et littérature, avec la contribution d’auteurs célèbres tels que Colette, Maxime Gorki, Henri Barbusse, Anatole France…
La même année, son ouvrage Et le feu s’éteignit sur la mer où il décrit assez crument Capri et ses habitants, suscite un nouveau scandale. Le conseil municipal de Capri s’en saisit et décide de l’expulser le 16 septembre 1909. Grâce à la médiation du marquis de Bugnano son beau-frère, on l’invite simplement à quitter l’île pour quelques temps.
Jacques Fersen et Nino Cesarini avec leur serviteur Sri-Lankais à Capri, 1905
Il ambitionne une revue homosexuelle internationale, puis part en Extrême-Orient
Début 1910, le baron de Fersen envisage de fonder une revue internationale en six langues et dédiée ouvertement à la défense de l’homosexualité. Malgré quelques appuis, le projet trop ambitieux tourne court.
Dès lors, Jacques en compagnie de Nino juste libéré du service militaire, embarque pour un long périple en Extrême-Orient qui dure près d’un an.
En avril 1913, autorisé de nouveau à rentrer à Capri, l’écrivain célèbre l’évènement par son poème Ode à la Terre Promise.
Mobilisé en août 1914, Jacques est jugé inapte et envoyé en cure de désintoxication, pour sa dépendance à l’opium et la cocaïne. De son côté Nino blessé à la guerre séjourne dans un hôpital milanais.
Le baron de Fersen passe ses longs mois de guerre enfermé dans sa villa, à écrire de nombreux poèmes dédiés à l’opium ainsi que des chroniques pour le quotidien Il Mattino.
Jacques se serait suicidé avec un cocktail de champagne et de cocaïne dans sa villa de Capri où il vit alors avec Corrado Annicelli, son jeune amant de 18 ans, qu’il surnomme son petit faune.
L’écriture, les voyages, la drogue, nourrissent sa quête de paradis terrestre
A la recherche d’un paradis terrestre pour une vie de rêve, tel pourrait être le résumé du trait principal de caractère du comte de Fersen.
Jouir le plus pleinement possible des plaisirs de la vie en société correspond à sa nature Poissons qui nage avec aisance dans toutes les eaux et sait se fondre à l’entourage et à l’ambiance du moment.
Son attrait naturel pour la vie orientale lui permet de combler son insatiable curiosité et lui donne une impression enivrante de liberté qui n’est qu’illusoire avec l’opium devenu sa dépendance.
La vivacité Gémeaux alliée au Cancer le met en quête permanente d’un ailleurs, promesse de nouveautés et de merveilleux, comme pour un pigeon voyageur.
L’écriture est œuvre libératoire pour son esprit à la fois imaginatif et jouisseur ouvert à 360° sur le monde et les gens qui l’entourent.
(Logiciel AUREAS AstroPC Paris)
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