Militante et propagandiste anarchiste individualiste, mêlée à
l'affaire de la bande à Bonnot.
Née dans un milieu paysan, à 16 ans, elle perd son père et ne
peut (faute d'argent) devenir institutrice. Refusant un mariage
arrangé par sa mère, elle arrive à Paris en 1904. Elle y
découvre la rude vie des couturières, mais prend des cours à la
Sorbonne, puis dans "les Universités populaires" qui fleurissent
alors (la première a été créée par l'anarchiste Georges Deherme).
Elle en vient à fréquenter "Les Causeries populaires" animées
par
Libertad qui édite le journal « L’Anarchie » et se joint aux
sorties champêtres organisées par les individualistes qui
prônent l'amour libre. En 1906, elle donne naissance à deux
filles Maud et Sarah et se marie avec le compagnon Louis Maîtrejean, sellier de profession. Il sera condamné en 1910 à 5
ans de prison pour fausse monnaie, mais avant cela, elle le
quitte pour aller vivre à Champrosay, près de Draveil, avec le
conférencier Maurice Vandamme dit Mauricus.. Le 30 juillet 1908,
alors qu'elle prend part à une manifestation de solidarité avec
les terrassiers, en grève depuis le 1er mai, le cortège est
violemment chargé par un régiment de dragons qui n'hésite pas à
tirer sur la foule, provoquant 4 morts et deux cents blessés,
dont Rirette qui est sérieusement atteinte à une jambe.
Elle retourne s'installer à Paris, et assure quelques mois en
1909 (avec Mauricius) la direction du journal (après la mort de
Libertad). Elle part en voyage pour la Tunisie avec Mauricius,
mais atteinte d'une méningite à Rome, elle est contrainte de
rentrer à Paris où elle va se lier avec
Victor Kibaltchiche,
arrivé de Belgique. En juillet 1911, avec lui, elle succède à Lorulot à la direction de "l'Anarchie" que ce dernier a
installée à Romainville. Ils y retrouvent certains compagnons
belges de Victor qui vivent en communauté, mais qui sont de plus
en plus portés vers l'illégalisme.
Rirette et Victor ne pouvant plus payer le terme, reviennent
s'installer à Paris, 24 rue Fessart, où ils poursuivent la
publication du journal. C'est là qu'ils apprendront le braquage
de la rue Ordener. Le 31 janvier 1912, ils sont perquisitionnés
par la police, puis Victor est arrêté. Rirette subit plusieurs
interrogatoires avant d'être à son tour placée en détention le
25 mars 1912 (pour un recel de revolvers), alors que la bande
poursuit une escalade sanglante à Chantilly. En février 1913
elle est jugée dans le procès des survivants de la bande. Elle
est acquittée mais Victor Kibaltchiche est condamné à 5 ans de
prison.
Alors que son compagnon est emprisonné à Melun, elle obtient de
se marier avec lui pour avoir le droit de lui écrire et de lui
rendre visite. L’union est célébrée en prison, le 4 août 1915.
Mais celui-ci, libéré en janvier 1917, est expulsé de France. Il
rejoint alors Barcelone, puis se brouille avec Rirette avant de
rejoindre la Russie bolchevique.
Elle travaille ensuite comme typographe, avant de devenir
correctrice de presse et d'intégrer le syndicat des correcteurs
en 1923. Durant des années trente, elle s'installe au Pré St
Gervais et vit avec Maurice Merle (un actif syndicaliste des
usines Renault) et collabore à « La Revue Anarchiste ». Elle
participera encore, en 1959, au journal "Liberté" fondé par
Louis Lecoin, mais devient progressivement aveugle à la fin de
sa vie.
"J'essayai d'expliquer au tribunal que si l'anarchie enseignait
aux hommes le mépris des morales conventionnelles, par contre
elle ne les incitait pas au meurtre. Chacun demeurait libre de
se déterminer selon sa conscience..."
Elle repose au columbarium du Père Lachaise à Paris.
Rirette Maîtrejean raconte qu’avec Kibaltchiche, ils ne se sont
jamais quittés, moralement parlant. Par sa correspondance, elle
l’a suivi dans toutes ses pérégrinations, en Allemagne,
Autriche, Silésie et enfin le Mexique. Le 17 novembre 1947,
quand elle apprend par la radio la mort de Kibaltchiche, elle
reconnaît que ce fut « un des plus grands chagrins de sa vie. »