Jean MERMOZ
Né le 9 décembre 1901 à 2 heures du matin à Aubenton 02 Aisne
Selon acte n°72 État-civil d’Aubenton
Disparu dans l’Atlantique sud le 7 décembre 1936 au cours de la traversée Dakar-Natal
Selon Jugement Tribunal Civil de première Instance
Consigné dans l’acte n°41 extrait acte décès Le Bourget 93 Seine-St-Denis
Pilote intrépide et audacieux bienfaiteur de l’Aéropostale et de l’aviation naissante
Le miracle des Andes
Mai 1930, 1ère liaison aéropostale transatlantique Afrique-Amérique du Sud.
J’ai été comblé par l’existence grâce à mon métier et à l’amitié. J’aime vivre. (Jean Mermoz).
Sauvé de la mort dans les sables du désert syrien
Une vie de paria, avant l’embauche chez Latécoère
Le sacerdoce de la ligne postale de Toulouse à Dakar
1936, une ambiance d’amertume et la mort dans l’océan tant survolé
Mermoz, ou les ailes de Prométhée pour que passe le courrier |
Pilote intrépide et audacieux bienfaiteur de l’Aéropostale et de l’aviation naissante
En 35 ans d’une courte vie, dont la moitié à vivre sa passion de l’air, il laisse une trace inoubliable au point que son nom se trouve dans le top 15 du palmarès des noms de rues avec 1059 rues Mermoz en France.
A travers un destin d’exception au pays du surhumain, cet homme de charisme semble avoir été admis pour un temps au royaume des dieux. Transcendé par sa passion de voler, il se révèle le pilote génial, intrépide et audacieux nécessaire à l’Aéropostale et à l’aviation naissante.
Fin 1925, il décroche la médaille de l’Aéro-Club de France pour le plus grand nombre de kilomètres dans l’année soit 120.000 kilomètres et 800 heures de vol.
En octobre 1927, l’équipage Mermoz-Négrin fait un vol sans escale de Toulouse à St-Louis-du-Sénégal.
Oser le 1er vol de nuit sur le tronçon Buenos-Aires / Rio le 16 avril 1928 lui vaut notamment la Grande médaille de vermeil de l’Aéro-Club de France.
Devant la critique de son équipe pour ses risques insensés, il répond : Personne ne vous forcera, mais je continuerai !
Le miracle des Andes
En mars 1929, c’est le miracle des Andes : Mermoz et son génial mécanicien Alexandre Collenot vont ensemble se sortir d’affaire après un atterrissage forcé dans la Cordillère des Andes. Rafistoler le zinc jour et nuit, par une température glaciaire, avec ficelles, fil de fer, bouts d’étoffe et de cuir… occupent les deux hommes affamés et transis de froid dans un décor d’apocalypse et le silence tragique du néant.
Après ces réparations de fortune, ils parviennent à reprendre le vol dans des conditions invraisemblables. Le visage ensanglanté par les morsures du froid ils sont méconnaissables pour ceux qui les voient atterrir à Copiapo et les Chiliens sont si incrédules de ce miracle qu’ils envoient une caravane à dos de mulet qui ramène réservoir, cric, banquette…
Cette épopée vaut à Mermoz une réputation de légende pour toute la population sud-américaine qui évoque un être surnaturel, un demi-dieu venu de France qui vole comme un oiseau et a la force des montagnes.
Mon vieux Collenot est un mécanicien sans pareil. C’est à lui, à son habileté prodigieuse, à son énergie, que je dois d’avoir échappé à la mort sur le plateau des Andes. Écrira plus tard Mermoz.
Mai 1930, 1ère liaison aéropostale transatlantique Afrique-Amérique du Sud.
Le 14 juillet 1929, c’est l’ouverture officielle de la ligne des Andes avec Henri Guillaumet à bord d’un Potez 25.
Le 12 mai 1930, il réalise l’exploit de la première liaison aéropostale transatlantique Afrique-Amérique du Sud, qui a un impact retentissant pour l’aviation internationale et le commerce mondial.
Mermoz est l’homme des 53 tentatives de décollage avec son hydravion depuis Natal et la dernière tentative est la bonne au grand soulagement de son équipe et de son chef Didier Daurat.
En décembre 1935, le vol postal part chaque semaine de France en Amérique par Dakar et Natal. Mermoz a réussi sa mission : construire la ligne régulière du courrier rêvée par Latécoère en 1918.
Héros glorieux de mille et une épopées aériennes et humaines, il est connu de tous.
Les hommes l’admirent, les femmes en sont amoureuses (*), les enfants veulent lui ressembler, en France et dans tous les pays, il est l’ambassadeur du ciel.
Jean Mermoz totalise 8200 heures de vol quand il disparaît dans l’Atlantique Sud à bord de l’hydravion La Croix-du-Sud le 6 décembre 1936 en compagnie d’Alexandre Pichodou second pilote, le capitaine Henri Ezan, le radio Edgar Cruvelhier et le mécanicien Jean Lavidalie, après un dernier message radio : Coupons moteur arrière droit.
(*) Un soir de 1936, dans un cabaret des Champs-Élysées Le Gerny’s, une voix pathétique, grandiose, inoubliable, jaillit, c’est celle d’Édith Piaf qui se produit en public pour la première fois. Et dans l’assistance enthousiaste, Mermoz subjugué par ce talent lui offre une coupe de champagne et prête son chapeau pour une quête…
Édith devenue amoureuse de son admirateur, ne cessera d’en parler au point que les autres filles l’appelleront en se moquant : Madame Mermoz. Sa chanson L’Étranger sera inspirée de cette rencontre d’un soir avec Mermoz.
Des hommes comme Mermoz, il n’y en a qu’un dans le ciel de France. Déclarera Édith Piaf.
J’ai été comblé par l’existence grâce à mon métier et à l’amitié. J’aime vivre.
(Jean Mermoz).
Pourtant, loin d’un destin chanceux, il a tout connu d’une destinée humaine, depuis la pauvreté, la misère noire, l’échec, la solitude, les privations, jusqu’aux victoires les plus enivrantes et la gloire sublime des pionniers de l’air.
Mainbressy, petit village des Ardennes voit grandir Jean Mermoz de 1903 jusqu’à la guerre. C’est là que sa mère s’est réfugiée chez ses parents suite à la mésentente de son couple avec Charles Mermoz. Un attachement affectueux et réciproque liera Jean à Mangaby (diminutif donné à maman Gabrielle).
Voir à l’âge de 12 ans, les géniales machines à voler et leurs pilotes audacieux tels Hubert Latham, Louis Blériot, Adolphe Pégoud ne déclenche aucun enthousiasme chez l’enfant qui dit préférer la mécanique et le dessin.
Pour fuir les troupes allemandes, ses grands-parents l’emmènent en Auvergne pendant trois ans. Puis c’est la vie à Paris pour Jean avec Mangaby devenue infirmière à l’hôpital Laënnec. Mais les temps sont durs et la misère citadine bien réelle.
Cuisante défaite pour Jean en 1919, quand il échoue au baccalauréat, lui qui voulait devenir ingénieur.
Finalement, s’engager dans l’armée lui semble la solution afin de ne plus être à charge de sa mère, et sur conseil d’un ami de la famille, le voilà intégré dans l’Armée de l’Air en juin 1920. Dans ce milieu de gardes-chiourmes, l’élève-pilote découvre pourtant la camaraderie et l’amitié et un beau jour, finit par être autorisé à voler seul.
« La fièvre de l’air et de l’aviation me tient ! » écrira-t-il à sa mère le soir même.
Ce n’est qu’à la troisième et ultime tentative permise qu’il parvient à décrocher son brevet de pilote sur Caudron G3 le 29 janvier 1921.
Sauvé de la mort dans les sables du désert syrien
Envoyé en escadrille à Metz, l’insoumis Mermoz vit douloureusement la soumission docile exigée par le règlement militaire.
Affecté à Beyrouth, là il trouve une ambiance militaire saine de franche camaraderie. Dans les sables du désert, on confie à ce pilote, très doué et dévoré par la passion du vol, des missions périlleuses où le danger de mort est omniprésent dans un pays en pleine rébellion.
En mars 1922, forcé d’atterrir avec un avion irréparable, il arpente, avec son mécanicien le chemin des caravanes guidé par le soleil le jour et la nuit par les étoiles, sans une goutte d’eau, pendant 40 km en pleine montagne et 20km de désert dont une partie avec sur les épaules, la charge inerte de son compagnon évanoui. C’est une patrouille de méharistes qui le récupère inanimé, les lèvres bleuies, la langue gonflée débordant de sa bouche. Mermoz dormira pendant 2 jours.
A peine rétabli, il veut voler.
De retour en France, il est affecté à Nancy dans la même escadrille qu’Henri Guillaumet qui devient son confident. Mais l’ambiance détestable le pousse à renoncer à une carrière de pilote militaire.
Une vie de paria, avant l’embauche chez Latécoère
De retour à la vie civile et nanti d’une expérience de 600 heures de vol, Mermoz sans le sou, candidate à toutes les adresses possibles et pour manger, se fait manœuvre, gardien de nuit, balayeur, écrivain d’adresses… et couche dans les asiles de nuit.
Il n’a qu’une idée fixe : piloter !
Quand début octobre 1924, Latécoère directeur de la ligne Toulouse-Casablanca le convoque, Mermoz trouve l’argent pour un billet de train 3e classe pour Toulouse. Mais au terrain de Montaudran, le froid Daurat aux mâchoires dures et au menton volontaire répond à l’audacieux Mermoz pressé de voler :
Ici, être pilote, c’est être ouvrier d’abord… je vous engage comme mécano…
Ici, on ne pose pas de questions, vous le verrez bien quand vous volerez… si vous volez…
Quand arrive enfin le grand jour du test de vol, Mermoz s’empresse de montrer tout ce qu’il a appris dont la voltige. Mais Daurat l’implacable lui rétorque :
Ici, nous n’engageons pas d’acrobates. Si vous voulez faire du cirque, allez vous faire voir ailleurs.
Après un nouveau test de vol sage cette fois, Mermoz est engagé. Ainsi prend fin sa vie de paria !
Daurat avouera plus tard, avoir reconnu de suite la classe de Mermoz mais comme il avait piloté en vaniteux et en individualiste, il lui fallait une leçon car ces valeurs-là étaient proscrites pour la ligne postale.
Hydravion La Croix-du-Sud, aux ordres du commandant Bonnot, arrive le 1er septembre 1934 à Natal.
Les sacs de poste, aussitôt extraits de la coque, vont reprendre leur vol à bord d'avions d’Air France. Source Wikipédia.
Le sacerdoce de la ligne postale de Toulouse à Dakar
Puis débute dans l’hiver 1925, le sacerdoce de la ligne postale Barcelone à Casablanca. Il faut que le courrier passe au plus vite et coûte que coûte. Cette religion du courrier convient bien à Mermoz amateur de vols risqués.
Ces vieux Bréguet-14, issus des avions de guerre, usés, rapetassés, sans T.S.F., ni météo, dotés d’un seul moteur instable et où le corps du pilote protégé par un mince pare-brise est exposé à tous les temps, sont de véritables cercueils volants.
La pluie, la grêle, les cyclones font de ces vols une lutte incessante.
L’emploi du temps de Mermoz se résume alors à dormir et voler entre Toulouse et Casablanca, sacrifiant même ses jours de congés pour remplacer les absents, tant il est habité par la passion du vol.
Puis en mars 1926, il prend ses fonctions sur la ligne Casablanca-Dakar, parcours le plus mythique et le plus dangereux. Là, aux intempéries s’ajoutent brumes de chaleur, cyclones et en-dessous c’est le Sahara espagnol où les Maures dissidents, organisés en bandes de pillards réputés féroces capturent contre rançon ou assassinent les malheureux pilotes contraints d’atterrir dans le désert des dunes.
Le 22 mai 1926, Mermoz, égaré dans la brume avec Ataf son interprète Maure, se pose au plus près des côtes. Fait prisonnier, rossé, assommé, attaché sur un chameau, il est finalement libéré au bout de longs jours terribles, contre une rançon de mille pesetas (50.000 francs de l’époque).
Après l’épopée africaine, se profile l’aventure sud-américaine à partir de 1927, où Latécoère vend son entreprise qui deviendra La Compagnie Générale Aéropostale.
Pour Mermoz âgé de 26 ans et devenu chef-pilote malgré lui, il y a tout à faire et à organiser sur cette ligne sud-américaine. Il veut bien manager une équipe s’il peut continuer à voler comme un simple pilote de ligne.
Là, il traverse les intempéries du climat tropical, au-dessus de la forêt vierge et de la côte montagneuse déchiquetée, avec des avions sujets aux pannes et à la carlingue découverte.
Jean Mermoz par l’écrivain Jacques Mortane
1936, une ambiance d’amertume et la mort dans l’océan tant survolé
En juin 1928, Jean Mermoz fait la connaissance de Gilberte Chazottes qu’il épousera le 23 août 1930 à Paris 15e. Fille d’un négociant français installé en Argentine et consul honoraire de Bahia Blanca, elle est mal préparée à la vie d’un pilote de ligne de l’envergure de Mermoz. Elle se heurte aussi au côté possessif de sa belle-mère qui voit en elle une rivale. De plus, les conflits nés entre les familles compliquent leur vie de couple restée sans enfant.
Ils se séparent à l’été 1936 et Jean, peu fait pour une vie conjugale ordinaire, retrouve à temps plein ce qu’il considère comme une tâche idéale et sacrée : voler pour que le courrier passe.
C’est aussi l’époque où l’Aéropostale est dans la tourmente, malmenée dans un contexte financier et politique qui désordonne cette œuvre bâtie à la gloire de l’aviation française par des pilotes passionnés. Mermoz qui en conçoit une grande amertume, s’engage un temps en politique aux côtés du Colonel de La Rocque.
Autre épreuve de l’année 1936 : le 9 février 1936, son génial mécanicien disparaît au large de Buenos-Aires.
Je pleure Collenot comme l’un des êtres les plus chers de ma vie.
Il était bon sincère et dévoué comme le sont tous nos mécaniciens, mais il avait cette foi et cette lumière que l’on ne retrouve que chez les êtres d’élite. Je ne pouvais m’imaginer qu’il pourrait s’en aller sans moi.
Confiera Mermoz à Jean Dabry peu avant de disparaître lui aussi dans les flots de l’Atlantique Sud.
Je ne voudrais mourir qu’en avion ! avait-il dit.
Ce sont les échecs bien supportés qui donnent le droit de réussir (Jean Mermoz).
Sources documentaires :
- Il était une fois Mermoz de Bernard Marck Éditions Jean Picollec
- Mermoz de Joseph Kessel Éditions Gallimard 1938
- Mes Vols de Jean Mermoz apocryphe 1937
- Dictionnaire universel de l’aviation de Bernard Marck Éditions Taillandier
- Jean Mermoz de Jacques Mortane Éditions Plon 1937
- Les Français du Ciel – dictionnaire historique Éditions Le Cherche Midi
- Grandes Heures de l’Aviation Édouard Petit éditions Connaissances Pierre Waleffe
- La Vie quotidienne dans l’aviation en France au début du 20e siècle de 1900 à 1935 Éditions Hachette
http://fandavion.free.fr/mermoz.htm
Pour retrouver l’aventure de l’Aéropostale par Didier Daurat :
https://www.ina.fr/contenus-editoriaux/articles-editoriaux/la-traversee-de-jean-mermoz-gravee-en-lettres-d-or/
https://m.ina.fr/video/AFE85009335/il-y-a-25-ans-disparaissait-jean-mermoz-video.html
Mermoz, ou les ailes de Prométhée pour que passe le courrier
Entre Sagittaire et Balance, Mermoz est un idéaliste et un pilote virtuose pour équilibrer les ailes de son avion. Que le courrier passe quoi qu’il arrive : c’est la mission qu’il se donne toujours et pour cela il prend tous les risques.
Bel exemple de la flèche du Sagittaire qui relie un point à un autre pour porter le courrier tout en s’élevant vers le plus haut pour se dépasser sans cesse.
En Uranien typé, il sait comme personne cultiver l’amitié tout en labourant le ciel d’un continent à l’autre. Sa courte destinée en livre de multiples exemples au sein de l’Aéropostale où la solidarité était valeur de base dans un contexte à hauts risques dans le ciel comme sur la terre et au-dessus des flots.
Indépendant et tenace, il aime trop sa liberté pour contraindre qui que ce soit, et c’est malgré lui qu’il se retrouve chef pilote en Amérique du Sud. C’est aussi un clin d’œil du destin pour cet homme qui a raison d’avance et trace des chemins nouveaux à l’écart du troupeau mais toujours pour une tâche idéale et sacrée et pour le bien du devenir humain.
Franchir en premier l’Atlantique Sud, profiter des vents ascendants pour passer par-dessus la Cordillère des Andes, oser voler de nuit étaient des audaces naturelles pour ce casse-cou de l’aviation stimulé par les risques.
Mermoz aventurier intrépide est l’explorateur des 4 éléments :
- le feu du désert saharien
- la terre impitoyable de la Cordillère des Andes.
- le vent et les tempêtes aériennes
- l’eau de l’Atlantique où il disparaît pour son dernier vol le 7 décembre 1936.
Merci à Marc Brun de m’avoir suggéré ce héros de l’air.
La Poste lui a rendu hommage en lui dédiant un timbre
(Logiciel AUREAS AstroPC Paris)
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