Pionnier de l’aviation, maître d’œuvre de la folle et merveilleuse aventure de l’Aéropostale naissante chez Latécoère dès 1919. D’une rigueur et d’une sévérité légendaires, il forge l’esprit de « la ligne ».

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Didier Désiré Constant DAURAT

Né le 2 janvier 1891 à 13h à Montreuil-sous-Bois 93 Seine-Saint-Denis
Selon acte EC n° 13

 Décédé le 2 décembre 1969 à Toulouse Haute-Garonne 31

 

 

De l’horlogerie à l’astronomie, avant que s’envole son destin

Exemplaire à la guerre, puis bâtisseur de l’Aéropostale

Insuffle l’esprit du courrier à des pilotes habités par le feu sacré

Surnommé par certains, le camarade gelé !

Daurat est l’âme de l’Aéropostale

Didier Daurat, la trempe d’un bâtisseur de cathédrales !

 

 

De l’horlogerie à l’astronomie, avant que s’envole son destin

Didier Daurat se forme dès quinze ans, à l’Ecole d’horlogerie et de mécanique de Paris, puis à dix-neuf ans, il est admis à l’Ecole de Mécanique. Intéressé par la cosmographie, il veut percer les secrets stellaires et déchiffrer les ellipses car il trouve dans l’étude scientifique de la course des astres et son application mécanique, l’horlogerie, un développement des notions d’harmonie et de hiérarchie, indispensables au commandement.

Il se sent, en effet, l’âme d’un leader, sans rien connaître encore de ce qui sera la passion de sa vie : l’aviation. D’ailleurs Didier Daurat dit être né le 16 décembre 1916, jour où il décroche son brevet de pilote.

Quand il entre à vingt-cinq ans chez Latécoère, il a déjà à son actif, de glorieux faits d’armes. Mobilisé en 1914, dans l’Infanterie, il sert dans l’infâme bourbier des tranchées pendant deux ans avant de rejoindre un bataillon de morts-vivants juste devant Verdun.

Une horrible période, où il voit ses camarades tomber sous la mitraille allemande dans l’indifférence de sa hiérarchie.

Blessé puis évacué sur Vichy, cet homme aussi petit qu’obstiné, aussi discret que volontaire demande à regagner le front en 1916 dans ce que l’on n’ose pas encore appeler l’Armée de l’Air.

Didier Daurat ignore tout des avions mais veut apprendre vite. A peine débarrassé de ses pansements, il tâte l’air avec les Caudron G3 et G4 et s’exerce même au premier looping.

Avec son camarade Beppo de Massimi, auteurs de nombreuses opérations d’observation et de reconnaissance, ils sont cités en exemple.

Après avoir frôlé la mort le 30 mai 1917, il s’illustre à nouveau en repérant la redoutable Grosse Bertha ; ce fameux canon allemand à très longue portée qui menace Paris et ébranle le moral de l’état-major français.

 

 

Exemplaire à la guerre, puis bâtisseur de l’Aéropostale

Promu commandant et décoré de la Croix de Guerre, Légion d’honneur et huit citations, ce trompe-la-mort se met en congés de l’armée en juillet 1919. Un autre terrain d’aventures exaltantes se profile pour lui à Toulouse, aux Lignes Aériennes Latécoère ancêtre de l’Aéropostale et d’Air France pour y bâtir une légende inoubliable.

D’abord pilote, il participe à l’ouverture de la ligne en direction de l’Afrique le 1er septembre 1919, qui en deux jours assure le premier service postal franco-marocain, de Toulouse à Rabat avec étape espagnole à Alicante.

Sur directive de Beppo de Massimi, proche collaborateur de Latécoère, il devient en 1920, chef d’aéroplace à Malaga, relais à équiper d’un atelier de réparation et de pièces de rechange.

Nommé chef d’exploitation chez Latécoère, il s’emploie illico presto à rassurer les sceptiques, et à insuffler une énergie nouvelle qui fonde l’esprit de la ligne et assure la pérennité de l’entreprise. Son charisme et son ascendant inspirent le respect.

Tout imprégné de sa mission postale aérienne, ses ordres claquent de façon indiscutable. L’homme ne laisse personne indifférent qu’on l’aime, qu’on l’admire ou qu’on le déteste.

 

Insuffle l’esprit du courrier à des pilotes habités par le feu sacré

Il se veut exemplaire et met au point un règlement où, précision, rigueur, ponctualité et ordre, sont les maîtres-mots. Habile à infléchir les points de vue, convaincre les hésitants, avec une rare énergie, il ne recule devant aucun obstacle pour servir la cause qu’il s’est donnée.

Pour la mission qui les attend, l’exigeant Daurat sait qu’il doit écarter les faibles, les peureux, les hésitants qui ne pourront jamais composer avec les éléments pour conquérir l’Afrique puis l’Atlantique. Il n’hésite pas à renvoyer sur l’heure, ceux dont la foi faiblit et reconduit à la porte du terrain, les épouses de pilote qui viennent s’insurger contre ses méthodes ; mieux il remercie aussitôt les pilotes de ces femmes contestataires. Dans le même temps, il ouvre grand la porte aux jeunes loups prêts à foncer sur un mot, un signe, tels de vaillants chevaliers impatients d’affronter les dangers au service d’une noble cause.

 

Surnommé par certains, le camarade gelé !

Admiré par beaucoup, craint par tous et haï par certains, il forge l’esprit du courrier aux pilotes qu’ils obligent à débuter leur carrière par le « Royal cambouis », pour la maintenance des avions. L’aptitude à démonter et réparer un moteur se révèlera vitale par la suite dans le Sahara ou les Andes.

Ainsi quand Jean Mermoz se présente et fait une brillante démonstration de pilotage à Toulouse, Daurat lui assène : Je n’ai pas besoin d’artistes de cirque mais de conducteurs d’autobus. On vous dressera ! Il perçoit son talent de pilote et l’engage quand même… pour nettoyer les moteurs d’abord !

La méthode Daurat fait ses preuves car les Lignes Latécoère puis l’Aéropostale parviennent à une ponctualité et une fiabilité inconnues à l’époque que ce soit sur la ligne Toulouse – Saint-Louis-du-Sénégal ou en direction de Santiago-du-Chili à travers l’Atlantique Sud et les mythiques Andes.

Henri Guillaumet, héros des Andes, sera le pilote emblématique de l’esprit de l’Aéropostale.

Côté constructeur, le nom de Breguet est attaché aussi à cette épopée légendaire.


Daurat devant un avion Bréguet

 

Daurat est l’âme de l’Aéropostale

Quand l’Aéropostale est intégrée à Air France en 1933, Daurat, qui n’a pas que des amis, est évincé. En 1935, il fonde la compagnie Air Bleu pour le transport du courrier dans toute la France, de jour et de nuit. Là aussi, le style Daurat donne des résultats remarquables mais à la déclaration de guerre, l’entreprise est militarisée.

A la Libération, il devient chef du centre d’exploitation d’Air France à Orly jusqu’à sa retraite en 1953.

Didier Daurat est l’âme de l’Aéropostale où l’acheminement du courrier est un « sacerdoce ». Sur 7.200 vols de nuit, un  seul a été détourné pour cause d’intempéries !

Il a sauvé une entreprise folle promise à l’échec et donné à l’aéronautique française un éclat extraordinaire.

Décédé à Toulouse, Daurat a l’exceptionnel privilège d’être inhumé, à sa demande, sur l’aérodrome de Toulouse-Montaudran, ancienne base de l’Aéropostale.

Son épouse Raymonde Blanc est une pianiste de renommée internationale.

 

Didier Daurat, la trempe d’un bâtisseur de cathédrales !

Didier Daurat, tout pétri d’air, de feu et de terre, a la trempe d’un bâtisseur de cathédrales, dont les murs sont les lignes postales qui se tissent à travers le ciel, dans le feu de l’action et grâce à une organisation pratique minutieuse.

Mû par une ambition idéaliste et habité par le sens du devoir, il a la passion de tout ce qui sert et relie les humains. Et l’Aéropostale naissante est précisément le moyen révolutionnaire pour accomplir cette mission de service.

Doué pour la gestion et l’organisation matérielle, il est idéalement taillé pour être chef d’exploitation.

Travailleur et volontaire jusqu’à la perfection, il est fait pour prendre à bras-le-corps des projets d’envergure au nom d’une ambition sur le long terme.

Le stress de voyages dangereux le stimule, lui qui se sent fasciné par tout ce qu’il y a d’illusions, de fuite hors du réel, de mystères dans les déplacements aériens.

Il est l’homme de la situation dans ce temps où s’opère le miracle des débuts de l’aviation.

Il puise sa force dans le concret des réalisations matérielles. C’est ce qui l’amène à répondre à Jean Mermoz, impatient de piloter :

-          Ici, être pilote, c’est être ouvrier d’abord. Vous passerez par la filière, je vous engage comme mécano. Allez voir le chef d‘atelier et demandez lui des bleus…

-          Bien Monsieur le directeur… Quand pourrais-je voler ?

-          Ici, on ne pose pas de question… Vous le verrez bien quand vous volerez… si vous volez… ajouta-t-il en me congédiant.

Il y a dans ces propos, toute la nature de Daurat, qui sous des abords froids et rudes cache un cœur affectueux et dévoué jusqu’au devoir accompli, coûte que coûte.

 

La Poste lui a rendu hommage en lui dédiant un timbre

 

 


(
Logiciel AUREAS AstroPC Paris)

 

En astrologie, d'où vient le goût de voler ?

Pour en savoir plus :

https://www.janinetissot.com/2019/11/12/les-pionniers-de-laviation/

 


Retrouvez l'acte sur les Archives Départementales Françaises en ligne

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