Haussmann, ou l’art de faire passer Paris de l’ère moyenâgeuse à l’époque prestigieuse !
Cet audacieux préfet dirige la métamorphose de la capitale,
que Napoléon III veut aussi embellie que Londres.

télécharger cet article

Le baron HAUSSMANN

(né Georges Eugène HAUSSMANN dit)

Né le 27 mars 1809 à six heures du matin à Paris 1er selon acte reconstitué

Décédé à Paris le 11 janvier 1891

 

Choisi par Napoléon III, par l’entremise du duc de Persigny,
il se voit confier l’œuvre titanesque de moderniser Paris

 Né dans une famille protestante, son père est commissaire des guerres et intendant militaire de Napoléon 1er. Il fait des études de droit tout en étant au Conservatoire de musique de Paris.

En 1831, il est nommé secrétaire général de la préfecture de la Vienne et l’année suivante, sous-préfet d’Yssingeaux, où il ne reste que quelques mois. A partir de fin 1832, il enchaîne successivement des postes de sous-préfet dans le Lot-et-Garonne, l’Ariège, la Gironde puis de préfet dans le Var et enfin dans l’Yonne à compter de mai 1850.

L’année suivante, à Paris, le prince Louis Napoléon Bonaparte accède au pouvoir présidentiel grâce notamment au bouillant bonapartiste qu’est le duc de Persigny. Ce dernier devient  ministre de l’Intérieur, fidèle confident et ardent serviteur de celui qui ne tardera pas à prendre le nom de Napoléon III et à proclamer l’avènement du Second Empire.

Napoléon III veut faire de Paris une ville belle et modernisée aussi prestigieuse que Londres qui l’a tant impressionné pendant ses deux années de séjour en Angleterre. Il appartient à son dévoué ministre de l’Intérieur Persigny d’étudier la mise en œuvre des nombreux travaux voulus par l’empereur pour moderniser de fond en comble Paris. Il faut dire que la capitale, avec ses rues sombres, étroites et insalubres,  se présente encore comme au Moyen-âge.

Pour cela, il faut du financement et c’est le cœur des difficiles discussions de Persigny avec Berger, le Préfet de la Seine d’alors. Quand le ministre, chaud partisan des « dépenses productives », argumente pour le convaincre, le préfet objecte : « ce n’est pas moi qui me prêterai jamais à ruiner la ville ». Et pour appuyer ses dires, ce dernier lance même une campagne de rumeurs taxant Persigny « de folie et d’aventurisme ». Dès lors, Persigny obtient de Sa Majesté de retirer la préfecture de la Seine au préfet Berger.

 

« Paris embellie, Paris agrandie, Paris assainie ».

Présenté à Napoléon III par Victor de Persigny, c’est Georges Eugène Haussmann qui, à sa grande surprise, devient Préfet de la Seine le 29 juin 1853 avec pour mission d’assainir et d’embellir Paris. Préoccupé d’urbanisme, l’empereur a soigneusement préparé les plans du nouveau Paris en s’inspirant de Londres, ville chère à son cœur.

Il s’agit non seulement d’y faciliter la circulation des personnes mais aussi d’en améliorer l’hygiène car le souvenir des terribles épidémies de choléra est encore vif. C’est pourquoi cette campagne s’intitule :

« Paris embellie, Paris agrandie, Paris assainie ».

Ainsi, à l’automne 1853, l’ardent et conquérant Haussmann, sous l’impulsion de son empereur, ouvre dans Paris un chantier jamais vu, nécessitant 1 500 architectes et 60 000 ouvriers pour embellir et moderniser la ville.

Haussmann occupera ce poste de Préfet pendant 17 ans, tout en étant fait baron et sénateur. Pour mettre en œuvre ce projet, il s’entoure de brillants ingénieurs dont Alphand et Belgrand qui, après lui, poursuivront son action.


Napoléon III remet au baron Haussmann le décret d'annexion
à Paris des communes suburbaines (1860)

 

Pour moderniser et assainir Paris,
mais aussi débarrasser la ville des foyers de révolution populaire

Le vaste programme confié au nouveau préfet, répond aussi à une préoccupation politique plus secrète qui est de prévenir et maîtriser d’éventuels rebellions du peuple : en 25 ans, Paris a connu 9 insurrections. Dans cette ville encore moyenâgeuse aux ruelles sombres et étroites, il est aisé d’ériger des barricades. C’est pourquoi Napoléon III prévoit des avenues et des boulevards rectilignes dont la largeur est calculée en fonction du rayon de braquage des pièces d’artillerie tirées par des chevaux. Ces larges artères sont destinées à faciliter l’action des forces de police et de l’artillerie contre d’éventuels barrages.

C’est ainsi que vont être démolis les vieux quartiers parisiens qui, depuis 1789, constituaient les principaux foyers révolutionnaires.

Des milliers de logis miséreux et insalubres sont détruits. L’’empereur veut voir se dresser des bâtiments bourgeois de belle hauteur, immeubles de rapport et hôtels particuliers qui s’imposent comme modèles de référence. Ils se ressemblent tous : c’est « l’esthétique du rationnel ».

Voilà de quoi donner à la capitale, un prestige impérial !

En raison du coût élevé du logement et des vivres, la population ouvrière parisienne se trouve contrainte d’émigrer vers les banlieues. D’ailleurs Haussmann argumente auprès de l’empereur, cette nécessaire mutation : il faut « accepter dans une juste mesure la cherté des loyers et des vivres [...] comme un auxiliaire utile pour défendre Paris contre l'invasion des ouvriers de la province. »


Monument dédié au baron Haussmann
à l’angle du bd Haussmann et de la rue de Laborde à Paris

 

 Un urbanisme prestigieux, un réseau d’assainissement moderne et…
l’organisation des arrondissements…

Une des priorités du Préfet de Paris est l’assainissement de la ville. En effet, les parisiens font encore appel aux porteurs d’eau et n’ont droit qu’à 2 litres et demi d’eau par jour. Le réseau d’égout existant est vétuste et ne s’étend que sur 160 km. C’est ainsi que se crée une sorte de ville sous la ville pour approvisionner en eau potable et évacuer les eaux usées. L’eau captée dans des sources souterraines situées parfois à plus de 100 km de Paris est acheminée par des aqueducs et stockée dans des réservoirs bâtis à l’entrée de la ville. C’est ainsi qu’en 20 ans, la production d’eau potable triple et le réseau d’égouts passe de 160 à 600 km.


Boulevard Haussmann à Paris

 

Le baron Haussmann fait œuvre de titan.

Sous sa direction, on perce de larges avenues rectilignes, on construit des monuments prestigieux, des mairies, des théâtres, des églises et aussi des jardins publics ainsi que des conduites d’eau et de gaz.

Au-delà de ce chantier colossal, Haussmann, organisateur-né, met en place le système de numérotation des arrondissements et des rues, en faisant partir, tout naturellement, le 1er arrondissement du Palais Impérial des Tuileries et les 19 arrondissements se succèdent en forme de colimaçon dans le sens des aiguilles d’une montre.

Il règlemente également la circulation dans toute la ville et pour les omnibus, il fait interdire le second étage aux dames, car en montant l’escalier on aurait pu apercevoir… leurs chevilles !

On lui doit également les célèbres colonnes Morris dédiées à l’affichage des  théâtres parisiens, jusqu’alors désordonné.

En même temps que Paris « s’haussmannise », les grands magasins font leur apparition tel « Le Printemps » qui ouvre en 1865, sur un boulevard nommé « Haussmann » en 1867.

En juin 1867, Gustave Eiffel et son épouse sont conviés à assister au bal de l'Hôtel-de-Ville donné par le baron Haussmann en l'honneur des têtes couronnées présentes à Paris à l'occasion de l'exposition Universelle de 1867. Haussmann est si fier de la passerelle métallique réalisée par Eiffel  près du parc des Buttes Chaumont qu'il fait visiter ce pont aux têtes couronnées de passage à l'exposition.

 

Administrateur hors pair, glorieux mais critiqué puis destitué en 1870

Le Préfet Haussmann, largement honoré est pourtant loin de faire l’unanimité. Energique, autoritaire et cynique et pas toujours regardant sur les moyens, il règne autour de lui, un climat de spéculations et d’affairisme dont il hérite le surnom de « Haussmann Pacha ».

En 1867, il suscite au Parlement des débats houleux qui provoquent un contrôle plus strict des travaux auquel il avait jusqu’alors échappé. C’est ainsi que Jules Ferry rédige la même année une brochure intitulée : « Les Comptes fantastiques d’Haussmann ».

Les parisiens le surnomment Attila, par référence à ses démolitions massives d’immeubles.

On lui reproche aussi de chasser le pauvre et l’ouvrier et de mépriser le patrimoine architectural. Mais l’haussmanisation fait école et les grandes villes de France s’en inspirent.

Ainsi en quinze ans à peine, Haussmann mène à bien le plus grand chantier du monde. Il est l’homme de la situation et parvient à métamorphoser Paris et à faire de cette capitale rebelle une ville prestigieuse au rayonnement international.

C’est ainsi qu’après l’éviction du baron, précédant de quelques mois la chute de Napoléon III, Jules Simon, son ennemi d’hier, lui rend hommage :

« Peu nous importe aujourd’hui que les comptes de M. Haussmann aient été fantastiques. Il avait entrepris de faire de Paris une ville magnifique et il y a complètement réussi… Son œuvre était au moins aussi fantastique que ses comptes. »

Destitué de son pouvoir le 5 janvier 1870, le baron Haussmann revient à la vie publique seulement en 1877, où il devient député de Corse jusqu’en 1881. Puis, il consacre la fin de sa vie à la rédaction des ses Mémoires.

Décédé le 11 janvier 1891, il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise.

 

Sources documentaires : Haussmann de Michel Carmona éditions Fayard

 

 


(
Logiciel AUREAS AstroPC Paris)


Retrouvez l'acte sur les Archives Départementales Françaises en ligne
http://www.landrucimetieres.fr/spip/spip.php?article776 

haut de page