Roland GARROS
Né Eugène Adrien Roland Georges GARROS
Le 6 octobre 1888 à 8h45 du matin à Saint-Denis Île de La Réunion
Selon acte de naissance n°742
Décédé le 5 octobre 1918 à Saint-Morel Ardennes 08
J’étais en face de ce que j’avais décidé de faire. Il n’y avait pas à hésiter !
Toujours plus haut avec le record mondial d’altitude en 1912
Après un survol de 500 km de mer, il franchit la Méditerranée avec 5 litres d’essence à l’arrivée
La guerre aérienne, les victoires, la captivité et la mort au combat…
Un Icare magnifique : des exhibitions périlleuses, aux combats chevaleresques… |
J’étais en face de ce que j’avais décidé de faire. Il n’y avait pas à hésiter !
Cravate, chemise, gilet, costume de ville… voilà Garros dans la tenue du parfait gentleman, pour passer aux commandes de ces aéroplanes qui, à l’aube du 20e siècle, lance l’aéronautique en France et dans le monde.
Ce fils d’Hermès vite surnommé « le roi de l’air », apprend à voler sur une « Demoiselle » Santos-Dumont, le plus petit avion de l’époque et aussi le moins cher.
J’étais en face de ce que j’avais décidé de faire. Il n’y avait pas à hésiter ! déclare-t-il en 1910 quand il s’installe pour la première fois dans un aéroplane.
Alors qu’il compte étudier le piano pour devenir concertiste, Garros vient de découvrir l’aviation à Reims lors d’un voyage d’agrément en 1909.
C’est le déclic d’une passion qui fait de sa vie un destin.
Nanti du brevet de pilote n°147 obtenu le 19 juillet 1910 à Cholet dans le Maine-et-Loire, il cède dès lors son commerce d’automobiles acquis après son diplôme d’HEC et de bachelier en droit. Et la même année, il rejoint le Show Moisant pour une tournée américaine, où il apprend vite à dompter ces oiseaux mécaniques qui font tant vibrer le public.
On dit que les femmes se retournent sur le passage de ce bateleur du ciel au regard d’ébène mûri sous les tropiques et promenant un air de dandy serein.
C’est en fait toute une foule en extase qui acclame partout ces incroyables pionniers de l’air. Bientôt les dons de virtuose de Garros sont tels qu’à son arrivée dans le ciel de Gênes, les cloches des 200 églises se mettent à carillonner.
Après des virages à couper le souffle, le voilà qui fond sur l’assistance tel un oiseau de proie prêt à raser le sol avant de prendre de la hauteur après deux boucles impressionnantes. Ainsi sur l’aérodrome improvisé de Champirol aviation près de Saint-Étienne, ce 3 août 1911, on n’avait jamais vu semblable affluence et pareil émoi, avec piétons, cyclistes, voitures, tramways, une ruée de grand-messe venue vibrer aux exploits des chevaliers du ciel.
Roland Garros vers 1910 au volant d'une Bugatti Type 18.
Toujours plus haut avec le record mondial d’altitude en 1912
Bourlinguer est dans les gènes de ce fils d’avocat et conseiller général, puisque Roland Garros a déjà séjourné en Cochinchine, aux Indes et à Madagascar à son arrivée en France à l’âge de 12 ans.
Pour fortifier sa santé fragile, il lui faut l’air méridional de Cannes où il fait ses études et devient un sportif endurant grâce notamment à la bicyclette. Une fois guéri, il termine ses études au Lycée Janson de Sailly à Paris.
Roland Garros qui vient de trouver sa voie dans le ciel s’illustre souvent lors des exhibitions aériennes et compétitions qui font s’affronter ces hommes volants tels des Icares aux ailes mécaniques.
Ainsi de 1910 à juillet 1914, il s’illustre dans plus de 70 meetings et journées d’aviation.
Possédé par la frénésie de l’air, pressé de vivre et de voler, il est le seul aviateur au monde en 1911 à participer à la fois à la course Paris-Madrid, Paris-Rome et au circuit européen (Paris, Liège, Spa, Liège, Utrecht, Bruxelles, Roubaix Calais, Londres, Calais, et Paris).
Il bat à trois reprises le record mondial d’altitude qu’il porte à 3910 mètres à Paramé près de St Malo le 4 septembre 1911, aux commandes de son Blériot.
Toujours plus haut… puisqu’il atteint 4960 mètres à Houlgate le 6 septembre 1912 et 5601 mètres à Tunis à bord d’un Morane-Saulnier, le 23 septembre 1912.
Après un survol de 500 km de mer, il franchit la Méditerranée avec 5 litres d’essence à l’arrivée
Et avec son survol mythique de la Méditerranée le 23 septembre 1913, ce jeune homme de 25 ans réussit le plus long raid de ville à ville et inscrit une des plus belles pages d’histoire de l’aviation naissante. Pour la 1ère fois, un avion relie deux continents.
Ce jour-là, il franchit 730 km dont 500 au-dessus de la mer, à bord d’un Morane-Saulnier type H avec un moteur Gnome de 60 cv soigneusement préparé par son mécanicien Jules Huc, artisan méconnu de ce succès.
Parti de Saint-Raphaël à 5h55 par temps clair mais avec des vents contraires, il s’élève jusqu’à 2500 mètres et suit un itinéraire longeant la Corse et la Sardaigne.
Lorsqu’il se pose dans un champ à 13h53 près de Bizerte où personne ne l’attend, il lui reste 5 litres d’essence !
En inspectant son moteur qui avait eu quelques sautes d’humeur, il découvre deux anomalies qui auraient pu être fatales. Un ressort de rappel manquait à la tête d’un cylindre, mais la force centrifuge avait permis le fonctionnement de la soupape. D’autre part, un axe de culbuteur s’était fendu, une moitié avait sauté, l’autre par chance s’était coincée à sa place !
La Providence a veillé. Garros est fait chevalier de la Légion d’honneur.
Peut-on mesurer aujourd’hui mesurer l’exploit de ce vol vers l’Afrique ?
Le pilote, le buste en plein air ; la quantité d’essence emportée pour un tel vol ; les calculs de consommation ; la précision de la navigation sans instruments et sans radio…
Tout cela signe le sérieux de la préparation et la parfaite connaissance du matériel à une époque où les pilotes étaient souvent qualifiés de « fous volants ».
Les records aériens pleuvent. Le 1er vol postal de l’histoire a lieu en Inde grâce à Henri Péquet le 18 février 1911. L’année même où Garros franchit la Méditerranée, Adolphe Pégoud est le 1er pilote qui saute en parachute d’un avion le 19 août 1913.
La guerre aérienne, les victoires, la captivité et la mort au combat…
Puis c’est la guerre.
Garros engagé volontaire l’aborde comme pilote d’observation et son 1er vol au front a lieu le 16 août 1914.
Dès 1914, il fonde le Groupe des Aviateurs, notamment pour aider veuves et orphelins de leurs camarades aviateurs morts au combat.
A l’instar de nombreux aviateurs, il rêve de passer sous l’Arc-de-Triomphe de l’Étoile. Après étude du projet, il déclare : Celui qui essaiera de passer là se tuera ! Pourtant Charles Godefroy, aviateur virtuose et inconnu réussit l’exploit unique le 7 août 1919.
Le Miroir n°236 vers 1915 avec en couverture Fonck et Garros
Garros signe sa première victoire aérienne le 1er avril 1915 à St-Pol-sur-Mer grâce à un système de tir à travers le champ de l’hélice qu’il a contribué à mettre au point avec Saulnier. Ce procédé efficace lui permet 4 autres succès dans les 2 semaines suivantes.
Contraint d’atterrir derrière les lignes ennemies au nord de Courtrai le 18 avril 1915, il ne réussit pas à incendier son appareil qui tombe aux mains des Allemands avec son précieux secret.
Fait prisonnier pendant 3 ans, il parvient à s’évader le 14 février 1918 déguisé en officier allemand. Il reprend sa place au combat sans avoir eu le temps d’assimiler tant l’évolution technique que la stratégie nouvelle de la guerre aérienne. De plus sa myopie prononcée devrait l’écarter de la chasse.
Sourd aux supplications de ses amis, et refusant le poste protégé que lui propose Clémenceau, il retrouve le groupe des Cigognes le 20 août 1918.
Après une ultime victoire aérienne le 2 octobre 1918, le lieutenant Garros, qui s’est aventuré au-delà des lignes ennemies, tombe sous le feu des assaillants dans le ciel ardennais.
Son corps est retrouvé à l’entrée même du cimetière de Vouziers !
Avion Morane-Saulnier équipé du tir à travers l’hélice – source Wikipédia
Sources documentaires :
- fiche biographique adressé par le Musée de l’Air et de l’Espace – Aéroport du Bourget adressée en mai 1997
- «Non à l’oubli » L’incroyable aventure française dans le ciel de Jacques Noetinger – Nouvelles Éditions Latines
- dictionnaire Robert2 p.720
- dictionnaire Les Français du Ciel éd. Le Cherche Midi p.230
- dictionnaire universel de l’aviation éd. Taillandier p.413-414
- Chronique du XXe Siècle p.147
- Grandes Heures de l’aviation Edmond Petit et Pierre Waleffe p.34
- article Le Progrès de Serge Granjon 16 mars 2003
- Pèlerin-Magazine n°6018 du 3 avril 1998
Tombe de Roland Garros à Vouziers – source Wikipédia
Un Icare magnifique : des exhibitions périlleuses aux combats chevaleresques…
Chez ce fou d’Icare, on trouve sans surprise une valorisation de l’axe nomade Gémeaux-Sagittaire. Ces deux signes voyageurs se combinent chez Roland Garros avec le goût des mécaniques d’avant-garde et au besoin de spectaculaire.
Habité par le feu ardent de la passion, il n’a de cesse de dépasser les obstacles au service d’une ambition réalisatrice exigeante.
L’influence jupitérienne en fait un excellent metteur en scène dans des exhibitions aériennes périlleuses qui tissent pour lui l’étoffe du héros populaire.
Séduire le public est un enjeu naturel pour la Balance, habile aussi dans l’air pour tenir en équilibre son aéroplane.
Fort d’un sang-froid et d’une rigueur à toute épreuve, Garros porte haut l’esprit chevaleresque du guerrier qui fait fi du danger et du risque de mort.
L’aviation a permis à cet homme d’action, habité par un destin de pionnier et de découvreur, de faire vivre toutes les facettes de son caractère.
En outre, son nom survit grâce à ce haut-lieu du sport français, stade baptisé à son nom en 1927, grâce à son ami Émile Lesieur. Il est un symbole qui sied à cet « as » de l’aviation par ses spectacles sportifs aux enjeux difficiles et stressants de la haute compétition, exigeant mobilité, maîtrise, enthousiasme et goût de la démonstration médiatique.
Roland Garros : quel destin fulgurant dans le ciel de l’aéronautique naissante !
Merci à Marc Brun de m’avoir mis sur la piste de cet Icare magnifique.
(Logiciel AUREAS AstroPC Paris)
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