Quand un faussaire génial rencontre un génie des mathématiques !
L’une des plus improbables et incroyables histoires vraies !

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VRAIN-LUCAS
Denis Vrin LUCAS alias …

Né le 1er décembre 1816 à 1h du matin à Lanneray Eure-et-Loir 28
Selon AD28 en ligne – NMD 1810-1820 – 3 E 205/5 – vue 223/343

 Décédé le 11 avril 1881 à 9h du matin à Châteaudun Eure-et-Loir 28
Selon acte n°53 - AD28 en ligne - vue 110/142 

 

 

Au hit-parade des faussaires en écriture

Plus de 27 000 fausses lettres de célébrités vendues pour 140 000 francs-or

Né pauvre mais doué et ambitieux

Les académiciens s’insurgent et l’escroc est arrêté

« Un bonnet d’âne pour l’académicien ! »

Mystificateur et magicien de l’écriture

 

 

Au hit-parade des faussaires en écriture

Vrain-Lucas a un talent tel qu’entre ses mains l’escroquerie s’érige en art.

Avec lui, la réalité dépasse de très loin la fiction !

Incomparable mystificateur, il serait resté méconnu, tombé dans les petites oubliettes de l’histoire, s’il n’avait croisé le destin d’un grand esprit de son siècle, Michel Chasles dont la crédulité à son égard n’aura d’égal que son génie de mathématicien.

Par un incroyable engrenage, il culmine au hit-parade des plus grands faussaires en écritures.

Quand un beau jour de 1862, Vrain-Lucas toque à la porte de Chasles mathématicien émérite septuagénaire, il n’imagine guère le succès qui l’attend.

Homme bossu presque chauve et portant petites lunettes cerclées de fer, c’est très humblement que Vrain-Lucas propose une lettre autographe de Molière et s’annonce lui-aussi natif d’Eure-et-Loir. Aussitôt les yeux du grand géomètre brillent de convoitise. Le voilà mis en confiance par ce rat de bibliothèque inespéré.

En fin limier, notre escroc compte surfer sur la mode en cours pour les manuscrits anciens : une passion secrète et inassouvie du brillant homme de science.


Lettre de Jeanne d’Arc à ses compagnons d’arme par Vrain-Lucas

 

Plus de 27 000 fausses lettres de célébrités vendues pour 140 000 francs-or

Questionné par l’académicien sur la provenance du document, le bossu à lunettes prend alors un ton confidentiel pour avouer qu’il s’agit d’une collection du comte de Boisjoudrain qui émigre en Amérique en 1791. Il périt dans son navire qui fait naufrage, mais on parvient à sauver la malle contenant des milliers de lettres. Vrain-Lucas se dit chargé de vendre ces documents pour le compte d’un érudit dans la misère.

Le mathématicien subjugué, recommande à son interlocuteur de ne rien vendre sans lui en parler. De son côté, le petit homme chauve lui demande surtout de ne pas ébruiter l’affaire car il a beaucoup mieux encore !

Foi de Beauceron !

En effet, il a beaucoup mieux pour épater l’homme de science quand il revient avec une lettre de Vercingétorix à l’envoyé de Jules César. Le vieux monsieur dans une déférence respectueuse dit n’en vouloir encore que cinq cents francs. Somme que le savant s’empresse d’aller quérir dans son secrétaire.

S’amorce alors une stupéfiante escroquerie encouragée par la naïveté sans borne d’un Chasles plus expert en géométrie qu’en histoire, qui va acquérir plus de 27 000 fausses lettres de célébrités allant de l’Antiquité classique à la fin du 17e siècle pour 140 000 francs-or !

 

Né pauvre mais doué et ambitieux

Fils d’ouvriers agricoles pauvres, Denis Lucas commence jeune par travailler la terre. À l’école communale, il apprend à lire et à écrire. Brillant dans ses études sans passer le baccalauréat, aussi doué qu’ambitieux, il s’instruit par lui-même et finit par devenir greffier à Châteaudun. Comme il vise plus haut, il monte à Paris et là pousse la porte de la Bibliothèque impériale où on le refuse faute d’être bachelier.

Il vivote dans un emploi de démarcheur pour un cabinet généalogique dont le rôle est de produire de faux arbres de noblesse aux bourgeois en mal de titres. Comme il a du temps pour fréquenter assidûment les bibliothèques, il s’amuse à reproduire des signatures anciennes. Très habile en contrefaçons, il sait comme personne donner une allure de vieilli aux encres et aux papiers.

Voilà notre homme prêt à tirer parti de son génie de faussaire auprès de Michel Chasles, esprit supérieur, savant éminent et riche.

Longue et invraisemblable est la liste des « pièces rarissimes » que Vrain-Lucas va livrer et vendre pendant huit ans à l’académicien qui le presse sans cesse d’en apporter davantage.

Lettres de Cléopâtre à Jules César, de Charles Martel au chef arabe avant sa mythique bataille de Poitiers, de Jeanne d’Arc à ses parents après sa rencontre avec Charles VII, de Christophe Colomb à Rabelais lui racontant ce qu’il a vu en Amérique, une proclamation farouche et menaçante du chef barbare Attila…

Ainsi ces lettres fabriquées selon le même procédé sont censées émaner de figures historiques mais aussi bibliques telle que la lettre de repentance de Judas Iscariote, l’un des apôtres responsable de l’arrestation de Jésus et cet incroyable manuscrit de menace de Caïn à Abel…

Voici un bref aperçu des lettres prétendument sauvées d’une malle naufragée et livrées au candide Michel Chasles toujours avide d’en obtenir de nouvelles.

 


Le faux laissez-passer accordé par Vercingétorix à Pompée par Vrain-Lucas :
« J'octroye le retour du jeune Trogues Pompens auprès de Jules César son maître
et ordonne à tous qui ces lettres verront le laissez-passer librement et l'aider au besoin. »
Fonds BnF.

 

Les académiciens s’insurgent et l’escroc est arrêté

Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu’au jour où Chasles généreux académicien se pique de présenter ses « trésors » à ses collègues et notamment des lettres de Charles-Quint à Rabelais, de Blaise Pascal mathématicien à son homologue Isaac Newton...

Du jour au lendemain, l’affaire prend une tournure nationale et même internationale pour devenir quasiment une affaire d’État.

C’est un tollé grandiose où savants de tous poils et de tous pays, mathématiciens, astronomes… s’insurgent contre ces invraisemblances qui bousculent les connaissances officielles.

Face aux doutes qui se font jour dans l’esprit des académiciens et au ramdam qui monte, Chasles est contraint d’indiquer que ses lettres proviennent de Vrain-Lucas.

Arrêté le 9 septembre 1869, pour escroquerie et abus de confiance, l’escroc est interrogé et vite confondu.

Enfin le 26 octobre 1869, Urbain Le Verrier obtient un vote de l’Académie des Sciences se désolidarisant des anachronismes et invraisemblances contenus dans les lettres de Chasles.

 

« Un bonnet d’âne pour l’académicien ! »

Quand la sentence tombe le 16 février 1870, Vrain-Lucas qui reconnaît les faits est condamné à 2 ans de prison et 500 francs d’amende.

Le public se bouscule dans le tribunal pour voir un savant très grand et en redingote noire avec décorations à la boutonnière qui se fait tout petit sur les bancs de la partie civile tandis que l’accusé, un bossu chauve à lunettes, arbore une allure de paysan roublard.

Le savant dans son témoignage reconnaît qu’il a été berné, mais il évoque avec respect ce « Monsieur Lucas » et ne paraît pas vraiment convaincu de sa culpabilité.

Quand Chasles se retire, l’assistance est pliée en deux et les cris fusent :

« Un bonnet d’âne pour l’académicien ! »

Lazare à Marseille, Aristote chez les druides, César et Vercingétorix qui s’échangent des politesses, Caïn qui menace Abel, Attila, le chef des Huns qui saurait écrire ! …

Autant d’histoires font se gausser le public si bien que le président du tribunal s’époumone et menace d’appeler la garde pour faire cesser cette ambiance de cabaret !

Vrain-Lucas sorti de prison en 1872, redonne libre cours à son talent d’escroc au point que vols de livres rares et abus de confiance le ramènent en prison avant qu’il ne finisse dans le commerce de livres anciens à Châteaudun.

Après le procès de 1870, les 27 320 faux autographes vendus à  Chasles par Vrain-Lucas sont détruits à l’exception de quelques-uns offerts au département des manuscrits de la BnF avec la permission de l’autorité judiciaire.

 


Lettre de Charlemagne par Vrain-Lucas

 

Sources documentaires :
- Les génies de l’arnaque de Jean-Marc Épinoux et Jean-François Nahmias sous l’égide de Pierre Bellemare, éditions Albin Michel
-
https://fr.wikipedia.org/wiki/Denis_Vrain-Lucas

 

 

Mystificateur et magicien de l’écriture

Vrain-Lucas en virginien scorpionesque semble habité par le génie de la mystification ;

il est une sorte de magicien de l’écriture quasiment jusqu’à la perfection.

C’est un don naturel chez ce scribe, capable par la plume de redonner vie à moult célébrités historiques ou bibliques, en mixant à sa sauce les faits de la grande histoire.

 (Mercure maître d’Asc. au Scorpion conjoint à Jupiter et Mars ; cet amas est en trigone à Pluton/Poissons.)

 Aussi matois qu’un maquignon, aussi discret qu’un matou faisant le guet devant une souricière, il sait faire grandiose tout en passant inaperçu pour filouter avec génie un savant crédule et comme envoûté.

 Irrésistible et fascinant dans l’exercice de ses escroqueries, il excelle à innover dans la roublardise.

(Soleil conjoint Uranus au Sagittaire en IV secteur où sont 6 planètes dont le Soleil et le maître d’Asc.)

 Habile à déguiser l’histoire avec une fine jouissance, il paraît surpris de berner un savant si facilement.

 Comme un magicien de foire, il épate un mathématicien crédule, fait se gausser tout un tribunal et malgré la prison se remet à roublarder avec génie.

 (Soleil en Sagittaire avec Jupiter conjoint à Mars et Mercure au Scorpion ; amas de 6 planètes en secteur III coloré par Neptune)

 


Logiciel Auréas Astro PC Paris

 


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