Eugénie NIBOYET
née MOUCHON
Née à 15h le 9 septembre 1796 à Montpellier 34 Hérault
(23 fructidor an IV de la République, déclarée le 24 fructidor)
Selon acte aimablement délivré par le service des archives de la mairie de Montpellier
Décédée le 6 janvier 1883 à Paris
Portrait d’Eugénie Niboyet par Nadar en 1880
Nous n’écrivons pas pour les esprits étroits qui veulent borner la femme aux soins du ménage.
Les femmes n’ont plus à acquérir leur liberté, mais à l’exercer.
Journaliste engagée dans les sujets de société,
Elle est à l’origine du premier journal féministe français.
Ses espoirs féministes sont déçus lors de la révolution de 1848.
Eugénie, une journaliste pionnière et combative |
Nous n’écrivons pas pour les esprits étroits qui veulent borner la femme aux soins du ménage.
Les femmes n’ont plus à acquérir leur liberté, mais à l’exercer.
C’est ce qu’écrira plus tard, Eugénie à l’une des ses sœurs.
Issue comme elle l’avoue elle-même d’une famille lettrée d’origine genevoise, elle a un père apothicaire gagné aux idées de la Révolution mais qui doit s’enfuir durant la Terreur. Ouvert aux idées nouvelles mais refusant les excès, Louis Mouchon échappe à la guillotine en se réfugiant dans les Cévennes. Il parvient à reprendre son métier de pharmacien à Lyon. Il élève ses fils dans « le respect et l’amour de Bonaparte ».
Sous la Restauration, Eugénie garde le souvenir de visites en prison où une partie de sa famille est détenue. Malgré tout elle affirme : en ce temps-là ma religion c'était l'Empire, mon idole Napoléon premier.
Eugénie a 26 ans quand elle se marie le 8 octobre 1822 avec l’avocat Paul-Louis Niboyet. Enfant de l’Empire, je ne pouvais épouser qu’un impérialiste écrira plus tard Eugénie dans son autobiographie à propos de l’amour de l’attachement de sa famille à Napoléon Ier qui a anobli son beau-père en 1810.
Le couple s’installe à Mâcon où Paul-Louis est avocat et où naîtra leur unique enfant qui sera écrivain sous le pseudonyme de Fortunio Niboyet.
Journaliste engagée dans les sujets de société,
Arrivée à Paris en 1829, 33 Eugénie a 32 ans quand elle commence à vivre de l’écriture.
Eugénie Niboyet s’implique dans les sujets de société de son temps tels que la réforme des prisons, l’amélioration de l’éducation, l’abolition de l’esclavage dans les colonies françaises.
Séduite par le saint-simonisme, elle adhère à ce mouvement (ainsi que son mari et son fils) dont la doctrine socio-économique et politique est déterminante au 19e siècle.
Eugénie s’y trouve chargée auprès des ouvriers de prédication mais aussi de leur apporter secours et instruction. En 1831, elle s’occupe de la section saint-simonienne des 4e et 5e arrondissements de Paris. A la suite d’un schisme au sein de ce mouvement, Eugénie s’en éloigne.
Elle est à l’origine du premier journal féministe français.
En 1832, avec les prolétaires saint-simoniennes, elle participe à la fondation de Femme libre, premier journal féministe français. Dès lors elle se rapproche du mouvement de Charles Fourier qui considère le traitement des femmes comme la mesure la plus vraie du progrès social. C’est dans ce contexte qu’Eugénie rencontre Flora Tristan.
De retour à Lyon, en 1833, elle fonde le premier journal féministe en province sous le titre Le Conseiller des femmes. L’année suivante, elle participe à la création de L’Athénée des femmes.
Revenue à Paris en juillet 1836, avec l’aide d’amis, elle fonde La Gazette des Femmes. Rédacteurs et abonnés formant une sorte de club, se réunissent pour gérer le journal mais aussi débattre entre autres de la lutte pour l’exercice des droits politiques et civiques des femmes.
De 1837 à 1840, de sa plume sortent trois pièces de théâtre aux styles divers : vaudeville, comédie, drame.
Ses espoirs féministes sont déçus lors de la révolution de 1848.
La révolution de 1848 fait naître de nouveaux espoirs notamment quant à la liberté de réunion et pour les droits des femmes. En mars 1848, elle crée et dirige La Voix des Femmes dédié à la seule question des femmes et de leurs droits. Un club s’y adjoint où Eugénie parvient à rassembler de nombreuses militantes féministes dont Elisa Lemonnier.
Ce club se fait défenseur de nombreuses réformes favorables aux femmes tant dans le domaine domestique que politique.
Mais quand La Voix des Femmes propose le 6 avril 1848 à l’Assemblée constituante la candidature de George Sand, celle-ci désavoue durement cette initiative. L’affaire fait grand bruit et Eugénie Niboyet et ses journalistes sont moqués par les caricaturistes. Le gouvernement met fin au club des femmes.
Le 20 juin, Eugénie Niboyet découragée et meurtrie cesse la publication et les féministes se dispersent pour éviter la répression.
Il faudra attendre encore un siècle pour que les femmes acquièrent le droit de vote.
Retirée de la vie politique Eugénie s’exile à Genève, où elle vit difficilement grâce à des traductions car l’indemnité littéraire attribuée en 1839 lui a été supprimée et ne lui sera jamais rétablie.
Elle soutient cependant les demandes de grâces des condamnés de la Commune de Paris.
Revenue en France en 1860, elle s’intéresse toujours à la cause féministe et publie Le Vrai livre des femmes. Et en 1864, elle publie Le Journal pour toutes afin d’améliorer l’éducation et le sort des femmes.
Célébrée au Congrès féministe de Paris en 1878, Eugénie Niboyet décède cinq ans plus tard à l’âge de 87 ans.
Eugénie, une journaliste pionnière et combative
L’écriture et la parole sont les expressions privilégiées d’Eugénie qui aime donner de la profondeur et une utilité pérenne à ses propos, marquée qu’elle est par la Vierge, les Gémeaux et aussi le Capricorne.
Ouverte sur les questions de son temps, les sujets difficiles aiguisent son opiniâtreté et son goût de la recherche jusque dans le détail pour donner sens et vigueur à ses écrits. Elle aime en débattre par le dialogue et aussi par la rédaction d’articles avec la volonté de convaincre sans relâche.
Actrice de la presse féministe, elle est habitée par le besoin de servir les plus démunis de la société dans un esprit avant-gardiste.
Même si elle ne voit guère de son vivant l’avancée du droit des femmes, cette militante se sent leur porte-parole, leur intermédiaire pour leur ouvrir l’accès à une indépendance indispensable à ses yeux.
Merci à l’historien Claude Latta de m’avoir fait connaître cette grande dame du journalisme par sa conférence du 20 octobre 2017 sur la révolte des canuts lyonnais.
(Logiciel AUREAS AstroPC Paris)
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