Prêtre humaniste, partisan du suffrage universel, de l’abolition des privilèges et de l’esclavage, il est l’une des figures emblématiques de la Révolution française.
Fondateur du Conservatoire National des Arts et Métiers et du Bureau des longitudes, il participe à la création de l’Institut de France.

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L’Abbé GREGOIRE
(Né Henry GREGOIRE dit…)

Né le 4 décembre 1750 à Veho Meurthe-et-Moselle 54
vers 23 heures
(selon indic. Comité Grégoire à Emberménil)
et selon acte de baptême AD54 en ligne (5Mi 555/R1 1710-1790 p.75/321)

 

Décédé le 28 mai 1831 à 16 heures à Paris
(Selon acte reconstitué Archives municipales de Paris en ligne
et
http://musee-abbe-gregoire.fr/un-homme/sa-biographie )

 

 

Instruit dès l’enfance, cet esprit brillant devient prêtre par vocation

Il est le fils de Sébastien Grégoire, tailleur d’habits qui a tenu un temps un office d’échevin, et de Marguerite Thébaut, femme d’une grande piété.

Très tôt le curé de son village remarque ses dons et sa vivacité d’esprit, si bien qu’à l’âge de huit ans, il n’a plus rien à lui apprendre et l’envoie étudier auprès de l’abbé du village voisin d’Emberménil. En compagnie de fils de la bonne société, il s’instruit avec des livres de Jean Racine, Virgile…

Puis, on l’oriente vers le collège des Jésuites de Nancy où il découvre les idées des Lumières, renouveau intellectuel et culturel qui se développe à cette époque. Mais comme la Compagnie de Jésus est bannie de France en 1763, il étudie la philosophie et la théologie  à l’Université de Nancy puis au séminaire de Metz.

Il a 23 ans, et son talent de poète lui permet de décrocher quelques succès.

Entré au séminaire de Nancy, il est ordonné prêtre le 1er avril 1775. Durant ses années de formation religieuse, il a traversé le doute, notamment après avoir dévoré les lectures philosophiques des Lumières. Finalement, il choisit la foi catholique, non pour faire comme ses aïeux, mais parce que la raison aidée de la grâce divine l’a conduit à la révélation.

 

Humaniste dans l’âme, l’abbé aide ses ouailles tant par la spiritualité que par l’éducation

L’abbé Grégoire, homme au caractère bien trempé, a de la prestance. Si sa vivacité le conduit parfois à des emportements, on lui reconnaît une grande ouverture d’esprit.

Le voilà curé de campagne dans sa région natale et en 1782, il prend la charge de deux paroisses. Convaincu que le curé est la pierre d’angle de l’église et de la société, il estime être le directeur spirituel et aussi le guide temporel de ses paroissiens. A ce propos, il souhaite combattre les préjugés en agronomie et aider les agriculteurs à améliorer leurs méthodes de culture.

Humaniste dans l’âme, il veille à l’éducation morale et hygiénique de ses ouailles. Ainsi dans sa cure, une bibliothèque d’ouvrages pratiques sur l’agriculture, l’hygiène et les arts mécaniques, est mise à disposition des villageois et à son départ, il la leur cède.

Son esprit brillant, éclectique et philanthrope le pousse à une vie intellectuelle très active. Il rencontre de nombreuses personnalités notamment protestantes. Il parle l’anglais, l’italien et l’espagnol et un peu l’allemand. Il observe notamment le fonctionnement démocratique de la Confédération suisse.

Toutefois, ses activités sont tournées principalement vers l’instruction des pauvres et le perfectionnement de l’agriculture.

A propos des discriminations qui frappent les israélites, il se prononce pour une tolérance religieuse à l’image du discours des Evangiles.

 

 

Nourri par ses réflexions antérieures, il est député aux Etats généraux de 1789

Nous sommes en 1787 et la Révolution couve même dans le clergé lorrain où se forme un syndicat de curés qui se bat pour avoir de meilleurs revenus dans un temps où évêques et chanoines concentrent les richesses du clergé. Il s’agit de remettre en cause l’ordre traditionnel dans l’Eglise fondé sur la hiérarchie tout en maintenant le rôle spirituel fondamental et en proclamant des revendications politiques et sociales novatrices.

Dans cette organisation syndicale, l’abbé Grégoire fait partie des prêtres commissaires du clergé. A cette occasion, il acquiert une expérience parlementaire et développe ses talents d’orateur.

Alors que ce mouvement s’enlise dans des querelles de personnes, l’abbé Grégoire s’en éloigne ; puis il est élu député du clergé (qui a 291 élus) aux Etats généraux de 1789. Dès lors, il se sent investi d’un « ministère sacré ».

Si Henri Grégoire se retrouve dans le personnel révolutionnaire dès le début des évènements, c’est le résultat d’années de réflexion théologico-politique et à Versailles il rencontre nombre de confrères imprégnés des mêmes idées.

A l’Assemblée Constituante, où il a un rôle de leader auprès de ses collègues ecclésiastiques, il réclame l’abolition totale des privilèges et l’instauration du suffrage universel.

Nommé l’un des secrétaires de l’Assemblée, il est l’un des premiers parmi le clergé à rejoindre le Tiers état et constamment veille à se joindre à la partie la plus démocratique de ce corps. Il préside la session qui durera 62 heures pendant que le peuple prendra la Bastille en 1789.

Il contribue à rédiger la Constitution civile du clergé. Par son exemple et ses écrits, il entraîne avec lui un grand nombre d’ecclésiastiques hésitants. A ce titre, il est considéré comme le chef de l’Eglise constitutionnelle de France. Il devient ainsi prêtre jureur ou assermenté et restera fidèle à son serment jusqu’à sa mort en mai 1831.

Les entreprises contre la liberté d’un peuple sont un attentat contre tous les autres

Henri Grégoire contribue à faire voter le 4 février 1794, la première abolition de l’esclavage, rétabli par Napoléon Bonaparte en 1802, puis à nouveau aboli par Victor Schoelcher en avril 1848.

L’abbé Grégoire découvre ce trafic honteux quand il vient siéger à Versailles. Obtenant la suppression de la prime royale aux négriers, cela lui vaut d’être hué, conspué, insulté, par ceux qui vivent de la traite des noirs (entre 600 000 et 1 million de personnes). Dans les Antilles, les grands planteurs de canne à sucre ouvrent même une souscription pour le faire assassiner mais cela échoue.

Napoléon, dont le beau-père est propriétaire de plantations de canne à sucre, va rétablir l’esclavage en 1802 car sans esclaves, plus de rendement dans les exploitations sucrières. Et il lui fallait de l’argent pour ses futures campagnes napoléoniennes !

Dès 1790, il lutte pour éradiquer les patois et universaliser la langue française afin de « créer un peuple » et émanciper les minorités, en généralisant l’enseignement de cette « langue de la liberté ».

Il œuvre aussi à faire reconnaître des droits civiques et politiques aux Juifs (sept. 1791). Il est élu évêque constitutionnel pour le Loir-et-Cher en 1791. Il administre son diocèse pendant six ans et ce, de façon exemplaire.

Un ami des hommes de toutes les couleursdéfenseur des minorités et des opprimés
(Lettre de l’abbé Grégoire, octobre 1814, pour l’arrêt de l’esclavage)

 

Ses convictions anti-esclavagistes le conduisent à créer, avec Robespierre et Condorcet, en 1789, la Société des amis des Noirs qui milite pour l’égalité des droits des blancs et des hommes de couleur. En 1808, dans sa Liste des Hommes courageux qui ont plaidé la cause des malheureux Noirs, il évoque Olympe de Gouges, pionnière de l’abolitionnisme.

Une place « abbé Grégoire » à Fort-de-France en Martinique est inaugurée en 1950 par Aimé Césaire.

Si par conviction religieuse et philosophique, il réprouve la peine de mort, il défend toutefois avec vigueur l’abolition de la royauté. Il ne participe pas au vote sur la mort de Louis XVI car, il est en mission pour la réunion de la Savoie à la France.

Elu président de la Convention, c’est en tenue épiscopale qu’il préside cette assemblée et condamne vigoureusement la déchristianisation des années 1793-1794. Ainsi, entre 1797 et 1801, il s’efforce de réorganiser l’Eglise constitutionnelle et de mettre sur pied une véritable Eglise gallicane.

Devant la Convention, et malgré les huées, il prononce son Discours où il demande la liberté de cultes et la réouverture des églises (1795).

Après la révolution et jusqu’à sa mort, il se défend de l’accusation de régicide, portée par des royalistes et des ecclésiastiques. En effet, s’il combat la royauté, ses convictions religieuses et philosophiques lui interdisent de verser le sang.  Je réprouve la peine de mort; et, je l'espère, ce reste de barbarie disparaîtra de nos lois.

Voyageant en Allemagne, il rencontre Goethe en 1805.

En 1814, le pouvoir lui suspend sa pension de sénateur. Opposé au Premier Consul et au Concordat, il se prononce pour la déchéance de Napoléon 1er, et sous la Restauration, il siège dans l’opposition libérale comme député de l’Isère (1819).

 


Timbre postal émis en 1990

 

Il faut éclairer l'ignorance qui ne connaît pas et la pauvreté qui n'a pas les moyens de connaître.

Nul ne peut être empêché d'exercer, en se conformant aux lois, le culte qu'il a choisi, nul ne peut être forcé de contribuer aux dépenses d'aucun culte et la République n'en salarie aucun."

 

Outre son action politique, religieuse et sociale au rayonnement exceptionnel, on doit à ce précurseur humaniste, inspiré et dynamique, un remarquable héritage :

-         La création du Conservatoire National des Arts et Métiers le 10 octobre 1794, afin d’enseigner à tous, les sciences et les techniques appliquées.

-         La mise en place du Bureau des Longitudes incluant l’Observatoire de Paris, par une loi du 25 juin 1795 afin d’améliorer la navigation maritime et ainsi reprendre « la maîtrise des mers aux Anglais ».

-         Il participe à la création de l’Institut de France dont il devient membre.

 

En juillet 1830, une campagne de presse se déchaîne contre l’abbé Grégoire. Au printemps 1831, atteint d’un cancer généralisé, il s’affaiblit et décède le 28 mai 1831 à 16 heures.

Dans son testament, il affecte des fonds notamment, pour lutter contre les préjugés racistes et pour l’éducation d’enfants pauvres.

Plus de 25 000 personnes assistent à ses funérailles. Inhumé au cimetière du Montparnasse, sur la croix, est gravée, à sa demande, cette prière :

Mon Dieu, faites moi miséricorde et pardonnez à mes ennemis "

" Ma voix et ma plume n'ont cessé de revendiquer les droits imprescriptibles de l'humanité souffrante, sans distinction de rang, de croyance, de couleur."


Source biographique :
http://musee-abbe-gregoire.fr/un-homme/sa-biographie

 


(Logiciel AUREAS AstroPC Paris)

 

Retrouvez l'acte sur les Archives Départementales Françaises en ligne

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