Edouard-Alfred MARTEL
né le 1er juillet 1859 à 16h30 à Pontoise 95 Val d’Oise
selon acte retranscrit
décédé le 3 juin 1938 à 7 heures
à Saint-Thomas-la-Garde (au château de la Garde) Loire 42
selon acte n°4
Avocat par tradition familiale, mais sa vraie passion est l’exploration souterraine
Très tôt, il se passionne pour la géographie, les sciences naturelles et les œuvres de Jules Verne et obtient en 1877, le premier prix de géographie au concours général.
Mais comme il est né dans une famille de juristes, son père le destine à une profession plus lucrative que celle d’explorateur. Ainsi, diplômé en droit, devenu clerc d’avoué, il prend la suite de son père, en 1886, comme avocat au tribunal de commerce de la Seine.
Cette profession qu’il exerce pendant une douzaine d’années lui laisse trop peu de temps à sa véritable passion qui est de s’enfoncer sous terre pour découvrir les lois de la géographie et de l’hydrogéologie souterraine, et par là-même, autant de beautés cachées de la nature.
Sa rencontre avec l’alpiniste Lequeutre oriente sa vocation vers l’exploration des splendeurs ignorées des Cévennes et de la Lozère : « Allez donc en Lozère, dit-il au jeune Martel, je suis trop vieux pour m'atteler à une aussi grosse besogne. Explorez les terrains de ces sites merveilleux. Vous y accomplirez probablement une belle tâche, en vous faisant un nom. »
Au péril de sa vie, il explore les plus importantes cavernes d’Europe et des Etats-Unis
Menant de front plaidoiries et spéléologie, les voyages qu’il fait pendant ses loisirs et vacances, lui permettent de réaliser des travaux de cartographie. Dès 1883, il s’intéresse aux plateaux déserts des Causses façonnés notamment par les gorges du Tarn et du Lot. D’ailleurs, ces « chers Causses » demeureront à ses yeux, les plus beaux sites du monde, selon les souvenirs de son épouse.
En 1889, il abandonne le barreau pour se consacrer totalement à sa véritable vocation.
De 1888 à 1936, que ce soit pour son plaisir ou pour des missions officielles, Edouard Martel explore en France, les Causses, le Jura, la Savoie, le Dauphiné, les Pyrénées, la Bretagne, le Vercors, la Provence... A l’étranger, il mène des explorations en Belgique, au Péloponnèse, en Autriche, Norvège, Irlande, Baléares, Caucase, Asie Mineure et plusieurs régions des Etats-Unis. Parcourant ces sites magnifiques, il découvre des merveilles naturelles révélées à ses yeux de savant curieux.
Exploration de l’aven Armand
Ses constats font avancer les connaissances en hydrologie
et développer l’hygiène pour lutter notamment contre la typhoïde
Il veille à asseoir sur des bases solides l’hydrologie souterraine. Ainsi, le plus important des résultats est sa découverte du mode de contamination des fausses sources des terrains calcaires. Fort de ses constatations, il démontre que les eaux d’infiltration peuvent véhiculer les germes de graves maladies épidémiques.
Ainsi, il entreprend dès 1891, une campagne pour réclamer des mesures d’hygiène pour lutter notamment contre la fièvre typhoïde. En 1894, il démontre que « la présence de matière en décomposition au fond d’un gouffre pouvait contaminer une source distante de quelques centaines de mètres, voire plusieurs kilomètres. » Dans ses écrits, il dénonce la pollution des eaux par les cadavres d’animaux. Le 30 janvier 1899, cette cause est plaidée à la Chambre des députés. Grâce à son action, associé au professeur Eugène Fournier, l’interdiction de jet de cadavres d’animaux et de détritus putrescibles dans les grottes est introduit dans la loi du 15 février 1902 dite loi Martel.
Le 5 janvier 1909, il devient membre titulaire du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique en France.
Ce beau vieillard aux yeux clairs parcourant les Causses, malgré sa popularité mondiale, demeure un discret et un modeste, dont le passage étonne la population des villages qu’il traverse :
A ce propos, son épouse se souvient : …parcourant en tous sens avec sa caravane itinérante transportant les échelles de corde, les treuils, les poulies, les bateaux de toile, le téléphone, les appareils à lumière électrique et à magnésium. L'émoi était grand parmi les populations des hameaux perdus qu'il traversait. Les gens se demandaient s'il s'agissait d'un cortège d'émigrants ou d'un cirque, mais les "renseignés" précisaient que c'était la troupe du "Monsieur qui voyageait pour les trous !"
Son épouse Aline De Launay qui l’accompagne dans ses excursions raconte :
Je me contentais de l'accompagner et de l'attendre à la sortie des gouffres en admirant le "recto" du paysage alors qu'il en découvrait le "verso" dans les entrailles de la terre... Si vous aviez vu dans quel état il remontait !... Un véritable égoutier !
C’est le 9 juillet 1889, qu’il découvre le gouffre de Padirac.
Entrée du gouffre de Padirac
D’abord descendu seul par une échelle de corde dans ce colossal entonnoir, il éprouve une impression fantastique : celle d’être au fond d'un télescope ayant pour objectif un morceau circulaire de ciel bleu.
Avec ses compagnons venus le rejoindre, ils scrutent le fond de l’abîme et passent de nombreuses heures à l’explorer, guidés par le murmure d’une eau courante.
D’année en année, l’exploration de cette rivière souterraine se poursuit, avec ce qu’il faut d’hardiesse, de passion et de persévérance pour surmonter les dangers, les multiples difficultés, la fatigue…
Cette exploration du sous-sol des Causses permet ainsi de faire découvrir aux touristes les merveilles qui comptent parmi les plus belles du monde entier : Padirac, Dargilan, Bramabiau, l’Aven Armand… avec ses centaines de stalagmites aux formes fantastiques, arbres de pierre aux feuillages nacrés d’une transparence de porcelaine…
En 1905, il explore le grand canyon du Verdon. A cette époque, refusant de reconnaître l’art pariétal paléolithique (Font de Gaume, Niaux), il se querelle avec l’abbé Henri Breuil, préhistorien déjà célèbre.
De 1905 à 1909, il est rédacteur en chef de La Nature puis se consacre à la Société de Géographie dont il est président.
Abîme de Bramabiau
Titulaire de nombreuses distinctions, il est fondateur et président de la Société de spéléologie.
C'est incontestablement à Edouard-Alfred Martel que l'on doit la véritable naissance de la Spéléologie non seulement en France mais dans le monde entier. (Bernard Gèze)
Un monument est érigé, en son honneur, au bord du Tarn. Son buste, posé sur un piédestal de roches et de stalagmites, est inauguré en 1927, en présence de Martel lui-même.
Son disciple, le spéléologue Norbert Casteret, écrit la vie d’Edouard Martel, montrant ainsi le courage, la ténacité et la témérité de cet homme qui a voué sa vie au monde souterrain.
Malgré son indépendance de caractère, Martel obtient des distinctions nombreuses et honorifiques.
Je n'ai pas eu, nous dit-il, le temps d'être ambitieux ! Mon farouche besoin d'indépendance m'écarta de toutes fonctions. Ainsi, j'ai fini par me trouver partout en marge. Mais cela me garda du moins de la politique, où l'on tenta de m'entraîner, et qui m'aurait englouti obscurément !
A partir de 1922, il vient habiter le château de La Garde à St Thomas-la-Garde où il vit jusqu’à son décès le 3 juin 1938. Pendant les deux dernières années de sa vie, devenu aveugle, il ne peut ni lire ni écrire. Il supporte pourtant son mal avec courage, réconforté par ses espérances chrétiennes.
Conformément à sa volonté, ces cérémonies s'effectuèrent sans aucun apparat, sans discours, dans la plus grande simplicité. Il quitta en silence notre monde turbulent et trop oublieux pour regagner le silence souterrain qu'il avait tant aimé au cours de cinquante années de son existence vouée aux ténèbres de la terre (Norbert Casteret).
Padirac
Phrase placée en exergue d’un de ses derniers ouvrages :
Se consoler des hommes par l'étude et l'admiration de la nature.
Sans intérêt, sans ambition, aimer et pratiquer la science pour son utilité...
Et si l'œuvre reste inachevée, transmettre l'outil aux remplaçants,
pour sortir sans bruit vers le Grand Repos !...
Rivière souterraine du gouffre de Padirac
Sources documentaires :
http://forezhistoire.free.fr/martel.html
http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89douard-Alfred_Martel
Edouard-Alfred MARTEL
(Logiciel AUREAS AstroPC Paris)
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