Faire reconnaître les droits des mutilés du travail est pour cet ancien ouvrier forgeron, le combat de sa vie qui aboutit en 1920 à constituer la Fédération des Mutilés du travail ancêtre de la Fédération nationale des Accidents du Travail et des Handicapés (FNATH).

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Baptiste MARCET

Né le 20 octobre 1883 à 1h du matin au Puy Haute-Loire 43
Selon acte n°347 – AD43 en ligne – 6 E 178/214 – 1883 – vue 44/57

Décédé le 10 mai 1964 à Allègre Haute-Loire 43

 


http://www.fnath.org/?action=detail&id=1060

 

 

Cet ancien maréchal-ferrant avait su forger l’une des plus grandes centrales ouvrières.

Tel est l’hommage rendu par Alexandre de Fraissinette, sénateur-maire de Saint-Etienne, lors du décès de Baptiste Marcet en 1964.

 

Fils naturel d’une dentelière, il est élevé par un oncle « rouge ».

Selon l’état-civil, il est le fils naturel de Marie Marcet, dentelière, qui ne pouvant l’élever le confie à un oncle boulanger à Allègre, Victor Coudert et sa femme.

Comme les autres petits campagnards, il fréquente l’école primaire et pour les vacances devient berger pour un fermier des environs.

L’oncle Coudert est un « rouge » républicain radical. Renommé pour avoir supprimé le travail de nuit de ses employés, il cultive les idées de la révolution de 1789. Il élève son neveu dans l’admiration des « grands ancêtres » et lui enseigne que les « droits de l’homme passent avant la raison d’Etat ».

Cette éducation marque le jeune Baptiste qui est reçu premier du canton au Certificat d’études. Baptiste se fait porteur d’eau sur le chantier de construction de la voie de chemin de fer, commis du secrétaire de mairie, réparateur de serrures…

Il est pris en apprentissage chez un oncle forgeron à Saint-Just-sur-Loire.

Petit, râblé, vigoureux et volontaire, il est aidé par une vive intelligence qui lui permet  dès l’âge de 16 ans, d’être un forgeron qualifié.

 

A 18 ans, forgeron à Paris, militant socialiste, il rencontre Jean Jaurès.

Après un passage à Saint-Etienne où il s’inscrit au Parti socialiste, il monte à Paris en 1901 et s’embauche chez un forgeron au pied de la butte Montmartre. Et quand Jean Jaurès vient tenir tribune dans le quartier, Baptiste lui conte la misère ouvrière de la région stéphanoise.

Pour le Parti socialiste, il vend des journaux dans la rue et au besoin, fait le coup de poing avec Les Camelots du Roi de l’Action française.

Mais il préfère la vie en province et revient à Saint-Etienne en 1905 alors qu’est réalisée l’unité du Parti socialiste sous le sigle SFIO. Embauché dans une forge, il devient secrétaire du syndicat des maréchaux-ferrants.

Militant politique et syndicaliste, il fréquente la Bourse du Travail où il s’initie aux combats et à l’histoire du syndicalisme auprès de responsables syndicaux. On lui enseigne que l’action des masses est vouée à l’échec si elle n’est pas appuyée sur une action juridique inlassable.

En 1908, blessé au bas-ventre par la ruade d’un cheval récalcitrant, il reste longtemps hospitalisé, et son action en réparation est si difficile à mener qu’il s’intéresse au sort des accidentés et mutilés du travail. Pendant la Grande Guerre, il travaille à la Manufacture des armes de Saint-Etienne. Puis, embauché chez un maréchal-ferrant il est aussi un militant actif à la Bourse du Travail dont il devient secrétaire-adjoint en 1920, puis s’occupe du dispensaire médical financé par des cotisations des ouvriers syndiqués.

Marié en 1907, il est  veuf dès 1919, quand sa jeune épouse Clémence meurt de grippe espagnole à 33 ans, le laissant seul avec sa fille Elise âgée de quatre ans et demi qu’il doit ensuite placer chez des parents en Haute-Loire.

 

Je marcherai pour toi, tu y verras pour moi. (l’aveugle et le paralytique)
L’union fait la force.

Tels sont les slogans choisis par la Fédération des Mutilés, en 1928, sous l’impulsion de Baptiste Marcet.

Par ses attributions, Marcet est confronté à la situation souvent dramatique des mutilés du travail dont les rentes ne sont pas revalorisées en ce lendemain de conflit où l’Etat s’intéresse d’abord aux victimes et veuves de guerre.

Une volonté de regrouper les mutilés du travail apparaît en France où se forment des groupements de défense.

C’est en novembre 1920 que Marcet contribue à fonder celui de Saint-Etienne, où se tient en 1921, le premier congrès de la Fédération avec 15 délégués et 2.500 adhérents.

Si son impact est modeste, il est le point de départ de la vie de militant de Baptiste Marcet, secrétaire juridique, qui va sillonner la France pour aider à mettre en place les groupements départementaux et expliquer aux mutilés, la nécessité de se regrouper pour se défendre.

Un journal est créé pour faire le lien entre les membres.

 

Elu à la tête de la Fédération des mutilés, à 42 ans.

En 1923, Baptiste Marcet est à l’origine d’un groupe parlementaire de défense des mutilés et invalides du travail, pour faire avancer leurs revendications.

Il est élu secrétaire fédéral en 1925, poste qu’il occupera quasiment jusqu’à son décès. Très attaché à sa ville, il obtient que le siège de la fédération soit fixé à Saint-Etienne.

Les actions déployées portent leurs fruits puisque de 111.000 timbres-cotisations placés en 1924, on passe à 1.373.000 en 1938 avec un journal « Mutilé du travail » tiré à 100.000 exemplaires en 1930.


Journal des Mutilés 07/01/1928

Former des militants à la législation ouvrière est une des grandes idées de Marcet qui crée un service juridique autonome pour agir devant les juridictions compétentes.

Un temps fort dans l’action auprès des pouvoirs publics est la réception en 1926 d’un groupe de mutilés par Raymond Poincaré alors président du Conseil.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, Marcet est arrêté en février 1941 et emprisonné dans la Haute-Vienne par le gouvernement de Vichy pour ses opinions socialistes. Libéré il reprend son poste à Saint-Etienne.

 

On lui doit  l’allocation aux invalides civils (infirmes de naissance).

Après la Libération, son combat pour les mutilés reprend et permet d’aboutir en 1949, notamment à la création de l’allocation aux invalides civils, c’est-à-dire aux infirmes de naissance, ainsi qu’à la revalorisation automatique des rentes.

Resté simple et modeste, un peu bourru, exigeant avec les autres comme avec lui-même, Baptiste Marcet parvient au soir de sa vie à installer la Fédération dans ses propres locaux en 1952, avenue Emile Loubet à Saint-Etienne. La Fédération continue son œuvre nationale puisqu’en 1963, il y a 4.138.000 timbres-cotisations placés.

En hommage à ce grand militant bâtisseur de justice sociale, plusieurs grandes villes françaises, dont Saint-Etienne, ont donné son nom à une rue.

 

Sa vie durant, il est à la pointe d’un juste combat pour rendre la dignité aux victimes du travail.

Agir pour la justice et l’équité sociale, avec ampleur, afin de triompher malgré les embûches est le leit-motiv de ce leader claivoyant.

Les enjeux difficiles et risqués stimulent sa ténacité.

Son énergie combative est à la mesure de son esprit vif, précis et exigeant.

Il perçoit mieux que quiconque la situation misérable et dévalorisante des mutilés, car il l’expérimente pour lui-même.

Jamais abattu par un échec, il accueille la réussite sans orgueil car pour lui ce n’est qu’une étape dans la voie du service aux mutilés du travail.

 

Merci à Claude Latta, historien, de m’avoir fait connaître ce grand nom de la solidarité sociale.

 

Sources documentaires :

- (2007-2015 Copyright Maitron/Editions de l’Atelier – Tous droits réservés – Maitron – 9, rue Malher 75004 Paris)

- http://noms.rues.st.etienne.free.fr/rues/marcet.html

 

 


(
Logiciel AUREAS AstroPC Paris)

 


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