Henriette CAILLAUX
(Née Geneviève Joséphine Henriette Rainouard épouse de Joseph CAILLAUX)
Née le 5 décembre 1874 à 5heures du matin à Rueil-Malmaison Hauts-de-Seine
Selon acte n° 213 archives municipales Rueil-Malmaison en ligne
Décédée le 29 janvier 1943 à Mamers Sarthe -72
Excédée par les attaques virulentes de la presse contre son époux…
En ce printemps 1914, si la France revancharde se prépare à la guerre, Henriette se sent, elle aussi, l’âme très belliqueuse. En effet, son mari, Joseph Caillaux, ministre des finances (gouvernement Doumergue et présidence Poincaré), est violemment attaqué par la presse pour son projet d’impôt sur le revenu et pour ses convictions pacifistes.
Et quand le 13 mars, Le Figaro publie une lettre compromettante, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase de sa rancœur. Dans ce courrier d’amoureux qui remonte à 1901, son mari « se félicite d'avoir fait capoter un vote sur l'impôt sur le revenu en paraissant le défendre ».
Cette campagne vise à discréditer Caillaux en pleine campagne électorale pour les législatives.
Plus que jamais déterminée à défendre la réputation de son mari et la sienne, Henriette décide de rencontrer Gaston Calmette, directeur du Figaro. Conduite dans la voiture de ministre (débarrassée de sa cocarde !) de son mari, elle débarque au 24, rue Drouot, siège du journal, dans l’après-midi du 16 mars 1914.
Authentique « Diane chasseresse », elle va « donner une leçon » au directeur du Figaro !
Veste en astrakan assortie à sa robe de satin noir, toque à aigrette, la dame se fait hautaine et porte l’élégance due à son rang. Curieusement, elle a les mains enfouies dans un énorme manchon de fourrure, alors que le printemps se fait sentir.
Sans doute est-elle nerveuse, mais elle n’en laisse rien paraître quand elle demande à rencontrer Gaston Calmette. L’huissier annonce qu’il est absent, et la visiteuse déterminée patiente dans l’antichambre.
Une heure plus tard, à 18 heures, Calmette arrive en compagnie de l’écrivain Paul Bourget. Il consent à recevoir la digne visiteuse dans son bureau, en se justifiant auprès de l’auteur : Je reçois toujours les femmes !
Après un très bref échange, Henriette sort de son manchon le pistolet acheté le matin même et vide son chargeur sur Calmette. Six balles sont tirées, deux se logent dans la bibliothèque et quatre atteignent le malheureux dont une lui perfore l’artère iliaque. Il meurt quelques heures plus tard sur la table d’opération d’une clinique de Neuilly.
Henriette reste plantée là, sans chercher à fuir. Et quand la police l’interroge au commissariat du faubourg Montmartre, elle reconnaît les faits, en expliquant qu’elle voulait lui donner une leçon et espérant qu’elle ne l’ait pas trop gravement blessé !
Couverture du Petit Journal illustrant l’assassinat de Gaston Calmette du 29 mars 1914
« Tragique épilogue d’une querelle politique »
Je ne voulais pas le tuer ! dira Henriette devant le jury
Lors de son procès ouvert le 20 juillet 1914, Henriette Caillaux et son avocat Fernand Labori, s’attachent à démontrer qu’il n’y a pas préméditation et qu’il s’agit d’un crime passionnel.
A cette époque, il n’était pas rare qu’un article de presse jugé infâmant soit lavé dans le sang notamment par un duel.
D’autre part, dans la société française d’alors le féminisme n’était pas encore de mise. Et la femme, juridiquement dépendante pour tout acte de l’autorité du père ou du mari, était réputée par sa féminité, avoir des réflexes incontrôlés, irréfléchis…
Acquittée ! au nom d’un crime passionnel…
L’avocat d’Henriette exploite si habilement ces stéréotypes bien ancrés dans la société d’alors qu’il obtient l’acquittement, ayant transformé le crime prémédité en crime passionnel.
Ce verdict est alors critiqué : on avance que plusieurs jurés ainsi que le président des Assises ont des opinions politiques proches du Parti radical dont Caillaux est l’une des principales figures. Des journalistes évoquent une collusion entre Caillaux et le juge d’instruction Boucard, sachant que le procureur a été fait Commandeur de la Légion d’Honneur quelques jours avant le procès.
Si Henriette a lavé dans le sang l’honneur familial, elle a, en même temps, tué la carrière prometteuse de son époux, qui après moult tribulations, ne regagne une place en politique qu’aux élections de 1924.
Quant à Henriette, au début des années 1930, on la retrouve historienne d’art diplômée de l’école du Louvre présentant une thèse sur la vie et l’œuvre du peintre Jules Dalou.
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