Clotilde BIZOLON
(née Marie-Josèphe Clotilde THEVENET épouse Bizolon)
née le 20 janvier 1871 à 16 h. (quatre heures du soir) à Coligny Ain 01
décédée le 3 mars 1940 à Lyon 69 Rhône
Veuve et son fils mort au Front, elle se dévoue pour les autres soldats…
Née d’un père sabotier, elle épouse le cordonnier Bizolon et un fils Georges naît le 25 août 1891. La famille vient s’installer à Lyon, dans le quartier de Perrache, où le cordonnier ouvre sa boutique. Dès le début de la Grande Guerre, le fils Bizolon est mobilisé et envoyé au Front au 21e Bataillon de Chasseurs à Pied.
Veuve depuis peu, Clotilde est désormais seule. Alors, elle décide de soutenir à sa manière le moral des troupes. Aidée de voisins, d’amis, elle improvise un comptoir fait de planches et de six tonneaux de bois dans le hall de la gare de Lyon-Perrache, pour proposer aux « poilus » de passage un peu de café, du vin et quelques mots de soutien. Ainsi réconfortés, ils sont nombreux à lui chanter « La Madelon ».
En 1915, Clotilde apprend la mort de son fils unique tué le 18 mars, en combattant dans le Pas-de-Calais. Comme elle a promis à son fils de continuer son œuvre même s’il meurt, elle tient parole.
« Déjeuner gratuit du soldat « Chez la Mère Bizolon »
La Mère Bizolon en 1914
Celle que les soldats appellent désormais « la Mère Bizolon » se trouve prématurément vieillie par son malheur et l’ampleur de sa tâche. En effet, le bouche à oreille fait son effet et les « poilus » sont de plus en plus nombreux à se rassembler autour de sa buvette.
Faire ce qui ne s’est jamais fait est dans son tempérament et en femme volontaire elle trouve l’énergie nécessaire pour remuer ciel et terre afin de financer la poursuite de sa tâche.
Les soldats trouvent là, non seulement de quoi boire et manger, mais aussi quelques mots de réconfort auprès de la généreuse Clotilde à l’oreille compatissante. Une timbale en fer blanc recueille les pièces qui s’ajoutent aux dons des passants, amis, voisins ainsi que d’un riche américain M. Hoff. Cela permet de maintenir la buvette en attendant la reconnaissance officielle qui tarde à arriver.
Après de multiples interventions auprès du maire de Lyon, Edouard Herriot, la mairie fait construire un abri en planches et en zinc, avec un comptoir extérieur, un guichet et une cheminée pour accueillir l’énorme cafetière de « la Maman des Poilus » qui devient une figure populaire lyonnaise.
Quand arrive l’armistice, à l’automne 1918, la Mère Bizolon revêt, au lieu de son habituelle robe noire, une robe au large col blanc, souvenir des jours heureux d’avant-guerre.
C’est la fin du conflit mais non le repos pour cette bienfaitrice infatigable qui transforme l’ancienne boutique de cordonnier en buvette pour les soldats démobilisés. Elle s’active aussi dans différentes œuvres charitables, rend service aux personnes âgées et garde les enfants du quartier. Son seul repos annuel se passe chez ses amis Hoff à Peyrieu.
En reconnaissance à cette dévouée bienfaitrice, Edouard Herriot la décore en mai 1925, de la Légion d’Honneur pour services rendus à la Nation.
A 69 ans, elle rouvre son comptoir à la Seconde Guerre mondiale
Le comptoir de la Mère Bizolon en 1939
Quand se déclenche la Seconde Guerre mondiale, la Mère Bizolon, humaniste et dévouée dans l’âme, malgré ses 69 ans et sa santé chancelante, rouvre chaque jour sa buvette à la gare de Perrache. Elle y offre aux soldats de passage, café, vin chaud ou bol de bouillon.
« La Maman des Poilus » connaît une fin tragique.
Le 29 février 1940, alerté par des gémissements, un voisin défonce sa porte et la trouve étendue dans une mare de sang. Agressée chez elle par un inconnu, elle est transportée à l’Hôtel-Dieu où elle décède le 3 mars, sans avoir pu témoigner auprès de la police. On a toutefois arrêté un singulier personnage : un unijambiste connu pour son agilité et recherché pour cambriolages. Mais cet homme s’empoisonne au dépôt du palais de justice. On découvre dans sa prothèse où il a caché le poison, une trousse de cambriolage. Le célèbre Docteur Locard lui attribue le crime. Toutefois, le mystère subsiste…
Les funérailles de « la Maman des Poilus » sont prises en charge par la ville de Lyon et se déroulent en présence du cardinal Gerlier et d’une nombreuse assistance dont d’anciens poilus.
Une petite rue de Lyon honore cette grande dame bienfaisante.
Merci à Marie-Edith et Jacques Cibert de m'avoir mis sur la piste de cette femme admirable !
(Logiciel AUREAS AstroPC Paris)
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