Héroïne de la Résistance et de la déportation,
Une Ligérienne témoigne…

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Marie-Suzanne BINÉTRUY
Née Marie-Suzanne Janine IGNACE

le 4 janvier 1924 à 4h à Villars 42 Loire
Selon état-civil acte n°2 aimablement transmis par la mairie de Villars

 Décédée le 10 avril 2009 à Versailles Yvelines 78

 


Cliché source famille via Claude Latta

 

On se sentait immortelles, intouchables…

Détenue, elle entonne la Marseillaise lors du départ en déportation

C’est notre amitié, notre fraternité et notre solidarité qui nous ont permis de tenir

Comment parler et dire l’indicible ?

Humaniste, combattante de l’ombre au nom de la Liberté

 

 

On se sentait immortelles, intouchables…

Pour Marie-Suzanne, lycéenne de 16 ans, la défaite de juin 1940 est une insupportable humiliation et pousse à la révolte cette jeune fille portée par un patriotisme instinctif.

Aussi dès 1941, étudiante en lettres à Lyon, elle est attirée par les mouvements de Résistance qui émergent alors dans le monde étudiant. Bientôt, elle fréquente l’Union des Étudiants Patriotes (UEP) regroupant des jeunes de toutes opinions qui se réunissent chaque semaine dans les sous-sols de la Faculté de Lettres.

Début 1944, on la retrouve parmi les fondatrices de l’Union Féminine Universitaire (UFU) : une sorte de Service Social polyvalent pour la fabrication de faux-papiers, le transport de fonds, le rôle d’agent de liaison dans le réseau de renseignement Navarre…

« On se sentait immortelles, intouchables » dira plus tard Marie-Suzanne à propos de cette période où elle s’active avec d’autre jeunes résistantes du monde étudiant.

« Une fois, à la gare de Perrache, [avec une autre résistante], j’ai récupéré une valise contenant un million de francs [près de 300 000€ d’aujourd’hui] que je devais porter, pour la Résistance, à un autre endroit. Comme il y avait le couvre-feu, nous avons passé la nuit dans la gare, avec la valise dans un coin ». Les deux jeunes résistantes s’endorment. Il y a un contrôle de police. « Le lendemain matin, un gendarme qui était à côté de nous, nous a dit : « Qu’elles sont imprudentes ces petites jeunes filles ! Je vous ai pas réveillées, j’ai dit que vous étiez avec moi ».

Dénoncée, elle est arrêtée par la Gestapo le 21 juin 1944 alors qu’elle récupère une valise de faux papiers.

Après avoir subi les interrogatoires et le supplice de la baignoire, évanouie puis ranimée, elle est emprisonnée au Fort Montluc avant d’être déportée à Ravensbrück, après un terrible voyage de 10 jours où les prisonnières sont entassées dans les wagons sans nourriture.

 

Détenue, elle entonne la Marseillaise lors du départ en déportation

Née Ligérienne d’un père instituteur puis directeur d’école à Saint-Étienne et d’une mère institutrice d’origine corrézienne, notre héroïne est imprégnée d’une double tradition républicaine et catholique, mais à l’âge de 7 ans, elle vit la douleur de perdre sa mère et son père se remarie.

De son père - ancien combattant de 14-18, Marie-Suzanne hérite des valeurs de l’enseignement et du patriotisme et de sa famille maternelle, une foi très profonde qui plus tard la soutiendra dans l’épreuve de la déportation.

Le baccalauréat en poche, la jeune Ligérienne part étudier à Lyon en vue du concours de l’École Normale Supérieure. À partir de la rentrée 1943 à la Faculté, elle prépare une licence de Lettres (Français, Latin, Grec), tout en s’activant dans la Résistance étudiante depuis 1941.

La fibre républicaine et patriote chevillée au corps, Marie-Suzanne entonnera la Marseillaise avec une cinquantaine de détenues rassemblées dans la cour avant leur déportation pour Ravensbrück le 1er juillet 1944 par le convoi 1244.

 


Marie-Suzanne étudiante - Cliché source famille via Claude Latta

 

C’est notre amitié, notre fraternité et notre solidarité qui nous ont permis de tenir

À 800 mètres sous terre, fabriquer des missiles V2 pour l’Allemagne nazie dans une ancienne mine de sel du camp de Beendorf, tel est le travail de Marie-Suzanne. Dans cette usine souterraine, le sabotage très risqué était parfois possible. « Sur la chaîne de montage, circulaient des modules de V2 qu’il fallait fraiser. -Pour les rendre inutilisables-, nous mettions du sel sur la pièce, on crachait dessus et on ajoutait de la graisse. Personne ne s’est aperçu de rien ».

à l’intérieur des baraquements : les châlits superposés avec 65 cm de largeur pour deux ou trois déportées, l’entassement des déportées, le bruit, l’odeur, les hurlements en allemand des gardiens, l’Appel matinal qui durait parfois des heures dans le froid.

Tout était fait pour humilier les déportées : « des containers de soupe avaient été répandus dans les cabinets à la turque et les tziganes, qui n’avaient rien à manger, lapaient la soupe par terre ».

Nous formions un groupe de cinq jeunes femmes » : Marie- Suzanne Ignace (20 ans) était la plus jeune (leur moyenne d’âge était de 22 ans). « C’est notre amitié, notre fraternité et notre solidarité qui nous ont permis de tenir. [Dans les circonstances les plus difficiles], nous nous tenions par la main ». « Notre force, c’était d’avoir résisté avant, d’avoir une culture qui nous donnait des références. 


Marie-Suzanne encore en costume de déportée mais libérée et avec son numéro de rapatriement

 

Comment parler et dire l’indicible ?

À la fin de la guerre, les déportées sont évacuées et entassées à 120 par wagon. Pour Marie-Suzanne, direction la Suède.

À mon arrivée, je m’étais évanouie, [ma survie] s’est jouée à quelques heures près. J’étais à bout, j’avais perdu le sens du réel. On m’a nourrie en me donnant du lait toutes les trois heures.

Ramenée à Paris par avion puis à St-Étienne en train :

« En Suède j’avais repris 30 kg et un de mes cousins m’a dit :

« Je suis content de voir qu’on avait exagéré… »

 Comment réagir ? Comment parler et dire l’indicible ?

Une page se referme.

La vie reprend pour Marie-Suzanne qui, dès octobre 1945, s’assied à nouveau sur les bancs de la Faculté.

Devenue professeure de Lettres classiques, elle se marie en 1953 avec Michel Binétruy un de ses compagnons de la Résistance.

Installée à Versailles, elle vit la naissance de ses quatre enfants comme la victoire suprême.

Sur la suggestion d’Henri Delporte, elle réalise une thèse sur Joseph Déchelette. C’est la première biographie complète sur ce grand archéologue. Soutenue en 1989, la thèse est publiée en 1994.

Pour garder contact et s’entraider, Marie-Suzanne rejoint l’ADIR (Association des Anciens Déportés et Internés de la Résistance) dont son amie Geneviève de Gaule-Anthonioz deviendra la 1ère présidente.

 

Sources documentaires :
Communication de Claude Latta historien devant les membres de La Diana (document pdf)
Retrouvez
Marie-Suzanne Binétruy par la voix de l’historien Claude Latta au micro de RCF
https://histoire-image.org/etudes/ravensbruck-principal-camp-concentration-femmes

 

 

 

Humaniste, combattante de l’ombre au nom de la Liberté

Entrer en Résistance pour cette native du Capricorne est quasiment réflexe naturel, d’autant plus que Marie-Suzanne bénéficie d’un ascendant Scorpion naturellement doué pour la stratégie d’actions dans un contexte de guerre.

 Mener le combat pour la pérennité d’un pays et son indépendance parle à cette jeune femme bien placée pour réagir aux évènements de son temps et agir avec détermination en vue de ce qui est bon pour le devenir humain de sa patrie.

(4 planètes angulaires ; Mars/Scorpion maître asc. en XII  trigone à Uranus/Poissons  en III ;  cet Uranus envoie trigone à Pluton/Cancer en VIII autre maître d’asc. ; Vénus/Verseau recevant sextil de Jupiter/Lune )

 Prompte à s’activer afin de redonner dignité et indépendance à son pays, elle le fait avec un enthousiasme naturel et communicatif qui vaut popularité pour cette humaniste combattante de l’ombre.

Elle aime entreprendre en grand et être à l’avant-garde de son temps.

 L’intérêt pour l’histoire va de soi pour cette Capricornienne éprise du goût de la recherche afin de donner de la durée au savoir et en conserver durablement les traces.

C’est ainsi qu’elle se fait biographe émérite de l’archéologue Joseph Déchelette, lui aussi capricornien grand teint.

 

Hommage à Marie-Suzanne IGNACE-BINÉTRUY Grande Dame de la Résistance !

 


Logiciel Auréas Astro PC Paris

 

Merci à Claude Latta pour ce signalement et ce témoignage rendu

 


Retrouvez l'acte sur les Archives Départementales Françaises en ligne

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