Henriette d’ANGEVILLE
(née Marie Henriette d’ANGEVILLE)
née le 10 mars 1794 à 15h à Semur-en-Auxois Côte-d’Or 21,
(déclarée le 21e jour de ventôse de l’an II de la République)
selon acte de naissance
décédée le 13 janvier 1871 à Lausanne Suisse
Quel bonheur de n’être éprise que de la tête et pour un amant glacé !
Henriette d’Angeville, célibataire, commente ainsi sa passion pour conquérir le Mont Blanc en ajoutant :
je suis la fiancée du Maudit !
(le Mont Maudit est un passage sur l’itinéraire qui mène au sommet du Mont Blanc)
Femme libre et indépendante très à l’écart des conventions sociales de son temps
Elle est née dans une famille de petite noblesse, propriétaire d’un château à Lompnès dans le bas-Bugey. Les tourments de la politique secouent son entourage puisque son grand-père est guillotiné et son père emprisonné.
Enfant, elle aime marcher et grimper et devenue adulte garde le goût de gravir les montagnes qui l’entourent. Mais c’est en 1838 que, découvrant Chamonix, lui vient l’envie de grimper au Mont-Blanc. En femme déterminée et audacieuse, ce projet est énergiquement mené. D’ailleurs, dans son carnet soigneusement tenu, elle indiquera : J’en ai eu l’idée depuis dix ans, le projet depuis un mois, le parti pris depuis quinze jours.
La voici qui se lance dans de minutieux préparatifs et se fait confectionner une toilette spéciale. Elle s’entraîne, s’habille comme un clown pour grimper, prépare son ascension et constitue sa caravane.
A la fin août 1838, elle s’en va de bon matin à Chamonix pour se présenter au local de la Compagnie des guides. Les volontaires ne se pressent pas et quand elle y parvient, le départ est différé au lundi car le lendemain dimanche est jour dédié à la prière et non à l’escalade.
12 guides et porteurs et une impressionnante liste de provisions
pour la victorieuse première d’Henriette
Quand le 3 septembre à 4 heures du matin, la caravane se met en route, Henriette est équipée d’un pantalon et de vêtements chauds tandis que les guides et porteurs sont chargés de la subsistance dont voici l’étonnante liste :
- Deux gigots de moutons
- Deux longes de veau
- Vingt-quatre poulets rôtis
- Six pains de trois à quatre livres
- Dix-huit bouteilles de vin de Saint-Jean
- Une eau-de-vie de Cognac
- Un petit baril de vin ordinaire pour le goûter des porteurs aux Grands Mulets
- Trois livres de sucre
- Trois livres de chocolat
- Trois livres de pruneaux
On conçoit qu’avec toutes ces provisions, il ait fallu une caravane composée de six guides, six porteurs et un muletier.
Henriette réjouie par cette aventure qui débute consent à s’encorder pour passer le glacier des Bossons. Puis les sentiers serpentent entre arêtes et ravins, après une nuit de halte, un lever à l’aube et un repas frugal, l’ascension se corse quand il s’agit de franchir les 354 marches taillées dans la glace à coups de hache. Parvenue au sommet, elle est toute à sa joie victorieuse qu’elle commentera ainsi :
« Mon pied foulait enfin le sommet du Mont-Blanc et je plantais mon bâton ferré sur sa croupe, comme un soldat arbore son étendard sur la citadelle qu’il a emportée d’assaut ».
Après une descente relativement plus simple, et une halte nocturne aux Grands Mulets, le groupe retrouve la vallée et les chamoniards étonnés. C’est ainsi que le 3 septembre 1838, Henriette d’Angeville devient la première femme alpiniste à avoir gravi le Mont-Blanc.
Certes, il y a eu avant elle, Marie Paradis, une servante d’auberge qui s’est retrouvée au sommet presque malgré elle. En effet, trente ans auparavant, celle-ci a été « tirée, traînée et portée » au sommet par ses amis guides qui espéraient ainsi la rendre riche et célèbre.
© Matthieu Riegler, CC-BY, Wikimedia Commons
Devenue la première femme à grimper au sommet du Mont-Blanc,
elle poursuit sa carrière d’alpiniste pendant un quart de siècle
En 1838, à la réception donnée par Henriette d’Angeville, Marie Paradis est présente et la félicite en lui confiant qu’elle la considère véritablement comme la première femme alpiniste à monter au sommet du Mont-Blanc, sans se faire aider.
Après cet exploit Henriette d’Angeville n’en reste pas là. Pendant 25 ans, elle continue une carrière d’alpiniste et réalise 21 autres ascensions dont une hivernale.
C’est à 69 ans qu’elle réalise sa dernière grande course : l’ascension de l’Oldenhorn dans les Diablerets (Alpes vaudoises).
Femme audacieuse, hors normes, qui fait ce qui ne s’est jamais fait, elle demeure cependant à l’écart des débats féministes de son époque.
Installée pour sa retraite à Ferney-Voltaire, elle s’intéresse en fin de vie à la spéléologie et fonde un musée de minéralogie à Lausanne.
(Logiciel AUREAS AstroPC Paris)
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