Inventeur du crayon qui porte son nom depuis plus de deux siècles, dessinateur, physicien, chimiste, son génie inventif témoigne d’une extraordinaire polyvalence

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Nicolas Jacques Conté

né le 4 août 1755 à Saint-Céneri-près-de-Sées 61 Orne
(Heure de naissance absente)

Décédé à Paris le 6 décembre 1805

 


Buste de Conté, place de l'Hôtel-de-Ville à Sées

 

 

Dessinateur et peintre remarqué et soutenu par les notables de sa région

Son père jardinier le laisse très jeune orphelin. C’est sa mère qui l’élève, et leur maison de chaume est sise dans le vallon de Saint-Céneri entre Argentan et Alençon. Très tôt, Nicolas montre des dons exceptionnels pour le dessin, la peinture et la mécanique où se manifeste déjà son esprit inventif.

Avant ses 12 ans, ce jeune campagnard taille déjà une sorte de violon avec un méchant couteau et il n’a pas 18 ans quand il se met au dessin et à la peinture.

Il dessine sans crayon mais en taillant des morceaux de charbon de bois sortis du foyer familial et pour les couleurs, il les fabrique lui-même. Il voit son talent encouragé par l’évêque ainsi que par la supérieure de l’hôpital de Sées. Ces notables l’invitent à peindre divers sujets religieux pour décorer cet établissement où l’on peut admirer encore aujourd’hui ses peintures.

Le jeune peintre de Saint-Céneri s’adonne alors à l’art du portrait. Il a le geste habile, sûr, et le trait précis. Il peint vite et ressemblant et c’est tout ce qui convient à sa clientèle charmée par ses tableaux à la vivacité tranchante.

Tout en étant un portraitiste au talent épatant, il n’en est pas moins épris de connaissances puisqu’il continue ses études de physique et surtout de mécanique.

 

Portraitiste et inventeur surdoué, on l’encourage à tenter sa chance à Paris

Chargé par un seigneur des environs d’Alençon, de lever le plan de sa vaste propriété, Nicolas Conté, imagine et réalise lui-même un instrument pour simplifier et rendre plus rapide ce travail de cadastre. Il invente et fabrique aussi, lui-même, une machine hydraulique soumise ensuite à l’Académie des Sciences. Comme en peinture, son ingéniosité rend admiratif car Nicolas, inventeur surdoué, ignore tout des machines du même genre qui ont précédé les siennes.

Comme le jeune homme est devenu peintre réputé dans toute sa région, l’Intendant d’Alençon désire le connaître et le persuade qu’un tel talent doit aller se perfectionner dans la capitale.

Entretemps, Nicolas s’est marié et son épouse, bien que d’origine distinguée est encore moins riche que lui.

Ainsi encouragé, le voilà parti à Paris, où dit-t-on, chance, succès et fortune sont aisés !

Cependant, c’est dans une obscurité studieuse et sans gloire que se déroulent les six premières années de son séjour dans la capitale.

Son activité de portraitiste suffit aux dépenses du ménage et son infatigable énergie lui permet de s’activer, sans relâche, à l’étude de sciences, comme l’anatomie, la chimie, la physique et la mécanique. Les professeurs remarquent cet élève particulièrement doué.

Ainsi  quand la Révolution de 1789 lui ôte les ressources de la peinture, il est suffisamment connu pour se trouver d’autres revenus, d’autant qu’il a le bonheur d’abriter et de cacher sous son toit un ami riche et jadis puissant. Cette prévoyante amitié lui vaudra reconnaissance.

 

La Révolution de 1789 en fait un maître aérostier, un physicien et un chimiste hors pair

C’est dans cette France en révolution et attaquée de toutes parts, que Conté va pouvoir donner la pleine mesure de ses multiples talents. Il y a un besoin urgent de toutes les compétences.

En effet, le Comité de salut public chargé de réunir les moyens de défense, songe à utiliser les aérostats pour renforcer ses opérations militaires. C’est ainsi que Nicolas anime une commission de savants nommés à cet effet. Puis, il est nommé directeur de l’école aérostatique de Meudon. En fait, ses élèves ne sont pas préparés par des études antérieures car, vu l’urgence de l’époque, c’est un rassemblement confus de jeunes gens issus de toutes les professions, ou ouvriers sans métier.

Dans cet art nouveau des ballons et des dirigeables, tout est à créer et Conté s’y dépense sans compter ! 

Il donne à la fois des leçons de théorie et de pratique, car cet enseignement doit embrasser la chimie, la physique et la mécanique.

Il dresse des plans, invente des instruments nouveaux, les fait tester par ses élèves, réalise des expériences parfois dangereuses. A ce propos, un jour qu’il étudie l’effet produit par des gaz différents sur des vernis, un courant d’air inattendu provoque une explosion qui lui fait perdre l’usage de l’œil gauche.

Tout juste remis de ses blessures, comme un vaillant soldat, il devient commandant en chef de tous les corps d’aérostiers. Il contribue notamment avec Joseph Montgolfier à la création du Conservatoire des Arts et Métiers.

 

Le blocus économique crée la pénurie…
on charge Conté d’inventer le crayon… origine de sa postérité

Nous sommes en 1794, et la France soumise à un blocus économique manque de crayons. Depuis le 16e siècle, ils sont faits avec du graphite de plombagine importé d’Angleterre. Conté se trouve chargé officiellement d’inventer une mine de crayon ne nécessitant plus de matière première importée de l’étranger. Quelques jours de recherches suffisent à ce « Professeur Tournesol ». Conté a l’idée de mélanger du graphite avec de l’argile, de cuire le tout et de l’enserrer entre deux demi-cylindres de bois de cèdre.

Le crayon Conté est né, mais l’inventeur se montre aussi désintéressé que génial. Et il faut toute l’insistance de ses amis pour le convaincre de protéger ses intérêts personnels et de déposer un brevet qu’il obtient le 3 janvier 1795. Moins d’un an plus tard, il fonde la manufacture de crayons qui porte son nom.

 

 

Conté fait merveille dans l’industrie militaire et civile durant l’expédition d’Egypte

Il s’occupe de créer des crayons de couleurs inaltérables, lorsqu’il est appelé, avec beaucoup d’autres savants, à participer à l’expédition napoléonienne d’Egypte.

Son esprit inventif y est des plus précieux et Conté se livre aux travaux les plus urgents pour défendre Alexandrie menacée par les Anglais. Il construit en deux jours, des fourneaux à boulets rouges avec les moyens les plus simples. Puis, il est envoyé au Caire, à la tête d’une armée d’ouvriers, en partie formés par ses soins. Mais le naufrage du vaisseau apportant de France machines et outils, l’oblige à tout créer même les outils.

Conté fonde aussitôt des ateliers ; il crée plusieurs moulins à vent dans un pays qui ne connaît rien de semblable. Des machines pour la monnaie, à la fabrication de la poudre en passant par diverses fonderies produisant canons, acier, carton, toiles vernissées…, rien ne le laisse démuni et Conté pourvoit à tout le nécessaire pour les besoins militaires de l’époque.

En moins d’un an, il apporte toutes les techniques européennes dans une terre qui les ignorait jusqu’alors. En savant humaniste, il veut que les autochtones profitent aussi de ses travaux : il visite les manufactures du pays et propose avec simplicité des améliorations faciles. C’est ainsi qu’en peu de temps on voit des procédés nouveaux introduits dans les fabriques égyptiennes. Etudiant les divers métiers, dessinant les ateliers, les instruments et les machines, il communique ses observations à l’Institut d’Egypte.

Les instruments manquent pour les ingénieurs, les chirurgiens… L’intuitif et clairvoyant Conté fait fabriquer des sabres pour l’armée, des ustensiles pour les hôpitaux, des outils pour  les mathématiques et la chirurgie, des lunettes pour les astronomes, des crayons (cela va de soi) pour les dessinateurs, des loupes pour les naturalistes. Tout se fabrique dans son établissement : qu’il s’agisse des complexes moulins à blé, ou de tambours, de trompettes… sans oublier la fabrication du pain qu’il perfectionne également.

Il installe un nouveau télégraphe et fait même des montgolfières destinées à animer les fêtes annuelles données par l’armée aux Egyptiens. Il conçoit aussi le projet de fabriquer du drap pour l’armée et la consommation des habitants.

On ne peut détailler tous les travaux réalisés par Conté en Egypte. Les généraux commandant en Egypte lui rendent justice, reconnaissant qu’il « avait nourri et habillé l’armée ». Mais le retour de l’expédition, le force à renoncer, à regret, à tout ce qu’il vient de réaliser en Egypte.

 

Conté avoue que son esprit inventif est stimulé par le désir de plaire à son épouse !

De retour en France, il est chargé par le gouvernement de diriger la réalisation du grand ouvrage que la commission d’Egypte veut publier. Il s’agit d’y représenter monuments et objets d’art. Le travail est immense et le coût considérable. Là encore, l’ingéniosité de Conté fait merveille car il imagine une machine à graver qui rend la tâche facile et rapide. Elle sera utilisée par d’autres artistes dans leurs ateliers.

Membre du bureau consultatif des arts et manufactures au ministère de l’Intérieur, il se fait présenter toutes les inventions nouvelles, du point de vue des intérêts de l'administration. Reprenant son rang au Conservatoire des Arts et Métiers, il est l’un des fondateurs de la Société d’encouragement qui rend de grands services à l’industrie.

Revenu parmi les siens, Conté a la douleur de perdre rapidement son frère, puis son épouse. Dès lors, son activité se ralentit et sa santé se dégrade. J'étais aiguillonné, confiait-il à un ami, par le désir de plaire à ma femme. Je lui rapportais tous mes succès. Que me reste-il maintenant ? 

 

Sa tombe au cimetière du Montparnasse

Il est l’un des premiers membres de la Légion d’honneur et meurt à 50 ans.

La marque « Conté » achetée en 1979 par le groupe BIC, existe encore de nos jours.


Les crayons Conté du 20e s.

 


(
Logiciel AUREAS AstroPC Paris)


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